Le président Emmanuel Macron prépare une réorganisation "complète" du culte musulman en France, a rapporté dimanche le Journal du Dimanche (JDD), précisant qu'il veut "aller vite". A en croire l'hebdomadaire, un plan d'ensemble est à l'étude à la présidence avec la coopération "active" du ministère de l'Intérieur, qui est également chargé du culte et prévoit la création de nouvelles instances représentatives des musulmans, l'élaboration d'un cadre pour le financement des lieux de culte et la collecte des dons et un programme de formation des imams. Selon des indiscrétions de personnes qui "abordent régulièrement la question" avec le président français, il souhaite "réduire l'influence des pays arabes, qui empêche l'islam français d'entrer dans la modernité", en voulant "inscrire le culte musulman dans une relation apaisée avec l'Etat et les autres religions et ( ) l'associer pleinement à la lutte contre le fondamentalisme". "Ma méthode, c'est d'avancer touche par touche", avait confié Emmanuel Macron au JDD qui rappelle qu'en recevant le 21 décembre dernier les représentants des religions, il avait posé le débat en dénonçant "la radicalisation de la laïcité", visant tous les partis politiques qui "instrumentalisent la loi de 1905 au service d'une guerre identitaire", selon un de ses conseillers. Le ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb, a été chargé dans ce cadre de préparer la réforme du Conseil français du culte musulman (CFCM), institution créée en 2003 sous l'égide de l'ancien président Nicolas Sarkozy, qu'un rapport du Sénat avait qualifié de "coquille vide" et pas du tout représentatif. Selon une enquête de l'Ifop pour l'Institut Montaigne publiée en 2016 par le JDD, à peine un tiers des musulmans connaissent son existence, rappelle le journal, citant des experts qui ont estimé que son mode de désignation de ses membres est un "facteur d'immobilisme". Les membres du CFCM sont élus, rappelle-t-on, dans les mosquées selon une répartition des sièges proportionnelle à la surface des bâtiments et dans un scrutin où l'influence des pays étrangers (Algérie, Maroc, Turquie, Arabie saoudite, Qatar) est déterminante. A cet effet, un groupe de travail a été créé, selon JDD, en son sein le mois dernier qui devra livrer des propositions de réforme eu gouvernement en juin prochain. Mais les personnes proches du ministre de l'Intérieur, en charge du dossier et qui affiche l'intention de "sortir de l'islam consulaire pour ouvrir le CFCM aux musulmans les plus intégrés", reconnaissent la difficulté de structurer ce culte qui "n'est aucunement hiérarchisée". Selon le sociologue Gilles Kepel, que JDD cite comme un des inspirateurs de Macron sur ce sujet, "il faut trouver une formule qui tienne compte de la plasticité du sunnisme français, sans que les musulmans soient les otages des rivalités entre leurs pays d'origine", alors que Hakim El Karoui, un autre consultant d'origine tunisienne, pense, pour sa part, que "le moment est venu de confier l'organisation à la nouvelle génération des Français de confession musulmane". Cet ancien banquier d'affaires (chez Rothschild, comme Macron) préconise, selon le journal, qu'à côté de la Fondation pour l'islam de France, créée sous le gouvernement Valls et présidée par l'ancien ministre Jean-Pierre Chevènement, une association "distincte" soit chargée de financer les lieux de culte, la formation et les salaires des imams, mais relève toutefois la difficulté de l'affranchir de l'influence du CFCM et de la tutelle de l'Etat. Les musulmans pourraient atteindre le nombre de 13 millions de la population française d'ici à 2050, selon une étude de l'institut de recherche américain Pew Research Center publiée en décembre dernier, soulignant que la France continuera de former la première communauté musulmane d'Europe.