L'Otan multipliait, hier, les contacts avec la Géorgie et la Russie pour tenter d'arrêter une guerre entre deux partenaires stratégiques de l'Alliance dont l'antagonisme est source de tensions entre les alliés. Le scénario catastrophe est en train de se réaliser : la Géorgie a lancé hier un appel à la communauté internationale pour lui demander de stopper « une agression militaire directe » de la Russie sur son territoire, après avoir elle-même démarré une opération militaire pour reprendre le contrôle de l'Ossétie du Sud, une de ses régions séparatistes. La Russie a envoyé hier des renforts en Ossétie du Sud, la Géorgie affirmant de son côté avoir pris le contrôle de la capitale de la province séparatiste Tskhinvali et avoir abattu deux avions de combat russes. Mais l'Otan ne veut pas être impliquée dans ce conflit. « L'Otan n'a pas de mandat pour jouer un rôle direct dans le Caucase », soulignent les responsables de l'Alliance. Son secrétaire général, Jaap de Hoop Scheffer, est néanmoins « très préoccupé » par l'évolution de la situation et a appelé « toutes les parties à un arrêt immédiat des affrontements armés et à engager des discussions directes ». La Russie a peu après annoncé avoir envoyé des troupes en Ossétie du Sud pour « venir en aide aux soldats de la force de maintien de la paix dans la région et contribuer à un arrêt des hostilités ». Les relations conflictuelles entre la Russie et la Géorgie sont un sérieux problème pour l'Otan. Tous deux sont en effet des « partenaires stratégiques », mais leur antagonisme est source de division au sein de l'Alliance. Le dernier sommet de l'Otan, début avril à Bucarest, a été l'illustration de ces divisions. La France et l'Allemagne, soutenues par un groupe d'une dizaine de pays, ont alors refusé d'accorder le statut de candidat à la Géorgie et à l'Ukraine, contrariant la stratégie du président américain George W. Bush. Les dirigeants français et allemands ont manifesté ainsi leur volonté de ne pas envenimer les relations de l'Union européenne avec la Russie, opposée à ce nouvel élargissement de l'Alliance dans son ancienne zone d'influence. La Russie est capitale pour l'approvisionnement de l'UE en gaz et en pétrole. Les Européens cherchent en fait à rester à l'écart du bras de fer engagé entre Moscou et Washington dans l'ancien glacis soviétique et veulent éviter de voir l'Otan entraînée dans ces querelles. Dans le même temps, ils sont impliqués dans plusieurs sujets de contentieux : le projet américain de bouclier antimissile, dont certains éléments seront installés en Europe – Washington négocie avec la Pologne et la République Tchèque – le soutien affiché aux gouvernements pro-occidentaux d'Ukraine et de Géorgie, le développement de l'oléoduc anglo-américain qui achemine du pétrole d'Azerbaïdjan vers la Turquie via la Géorgie. De leur côté, les Etats-Unis ont appelé hier à un cessez-le-feu immédiat en Ossétie du Sud et décidé d'envoyer un émissaire dans la région pour se joindre aux efforts internationaux de médiation. Par ailleurs, Vladimir Vassilyev, chef du comité pour la sécurité de la Douma (chambre basse du Parlement russe), a déclaré hier que la Géorgie n'aurait pas pu lancer de campagne militaire en Ossétie du Sud sans la participation des Etats-Unis.