Devant la menace d'une récession aux Etats-Unis et en Europe, les ministres des 13 pays membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) s'inquiètent de voir les cours chuter davantage. Ils gardent en mémoire le scénario catastrophe de 1998, quand le baril était tombé à 10 dollars dans la foulée de la crise asiatique. Néanmoins, face à la dégringolade des prix de l'or noir, les membres de l'Opep avaient, hier lors de leur réunion à Vienne, des approches différentes sur la conduite à adopter pour stabiliser le marché confronté à un problème de surproduction et à une baisse de la demande. Entre ceux qui militaient pour un maintien en l'état de la production (32,8 millions de barils par jour, soit 40% environ de l'offre mondiale) comme les pays du Golfe et les partisans d'une réduction de la production comme l'Algérie, l'Iran, le Venezuela ou la Libye, la marge est restée serrée, en ce sens que « tout le monde est d'accord sur le fait qu'il y aura un problème de surproduction de 500 000 à 1 million de barils par jour d'ici l'année prochaine », explique Chakib Khelil, président de l'Opep. Avant la tenue de la réunion, le ministre iranien du Pétrole, Gholam Hossein Nozar, a déclaré qu'il n'y avait pas de recommandation précise pour la rencontre. Cependant, à la veille de la réunion de Vienne, le ministre koweïtien du Pétrole, Mohammad Al Olaim, a estimé à son arrivée à la capitale autrichienne qu'il n'y avait pas lieu de réduire la production de l'Opep. « Nous sommes inquiets du ralentissement économique mondial », a-t-il également affirmé. Et d'ajouter que l'Opep devait « prêter attention à ce mécanisme du marché, l'approvisionnement, la demande et les stocks et leur impact sur la demande future. Nous devons parler du mécanisme entre l'approvisionnement et la demande, de ce qui est proposé actuellement sur le marché et des prévisions ». Chef de file du camp des pays soutenant le maintien du niveau actuel de la production, l'Arabie Saoudite a clairement indiqué qu'elle voyait d'un bon œil le récent recul du prix du baril, frôlant à nouveau les 100 dollars. « Le marché est assez bien équilibré », a affirmé le ministre saoudien du Pétrole, Ali Al Nouaïmi, en arrivant à Vienne. Il est à rappeler qu'en juin, alors que les prix du brut flambaient sur fond d'économie mondiale fragilisée, l'Arabie Saoudite, inquiète de voir ses principaux clients entrer en récession, avait unilatéralement pris la décision de doper sa production d'un demi-million de barils par jour. Celle-ci tourne aujourd'hui autour de 9,6 millions de barils par jour, alors que son quota officiel n'est que de 8,94 mbj. Pour le respect des quotas A l'opposé de l'Arabie saoudite et ses alliés, le camp des pays militant pour une réduction de la production tentait, hier, d'imposer son choix à vienne. En effet, l'Iran a demandé officiellement un meilleur respect des quotas, appelant les Saoudiens à résorber leur excédent de production pour empêcher un surplus de se former et les prix de chuter davantage. Le prix du pétrole doit « être suffisant pour attirer les investisseurs », a argumenté mardi le ministre iranien Gholam Hossein Nozari, en réaction aux propos de son homologue saoudien. Le ministre plaide, depuis quelque temps, en faveur d'un plancher à cent dollars. Il faut dire, cependant, que tous les membres de l'Opep ne s'accordent pas sur le plancher de prix à défendre. Les plus résolus veulent empêcher le baril de tomber sous les 100 dollars. Pour le ministre équatorien du Pétrole et des Mines, Galo Chiriboga, un prix « raisonnable » se situerait entre 110 et 120 dollars, mais un prix inférieur ne serait pas « adéquat ». Aux yeux des experts, si l'Iran, le Venezuela, l'Equateur, l'Algérie et la Libye s'inquiètent d'un prix du baril inférieur à 100 dollars, « les pays du Golfe peuvent se satisfaire de 80 dollars, voire moins et ne veulent pas accroître la pression sur l'économie mondiale avant l'hiver, quand la demande de pétrole va remonter ». Pour ce qui est des quotas de production, toute la question est de savoir si l'Arabie Saoudite va accepter de réduire son excédent de production. A quelques heures de la réunion, le président de l'Opep, Chakib Khelil, a affirmé que les pays membres de l'Organisation « allaient rester au niveau de production où ils se trouvent en ce moment ». M. Khelil a indiqué également que « l'offre excède le niveau de la demande ». Il a noté, cependant, que même si l'Opep réduisait sa production, rien ne garantit que cela pourrait empêcher les prix de tomber.