Hôtels, bars-restaurants « piliers » dans l'eau, résidences de standing et maisons « estivales » faisant face à la grande bleue. La zone côtière de la wilaya de Tizi Ouzou n'attire pas que des touristes. Elle est convoitée par le béton. De Tigzirt à Aït Chafaâ en passant par les plages de Sidi Khaled, Iflissen et Azzefoun, le littoral subit des agressions à cause de l'urbanisation anarchique. La spéculation foncière menace même le domaine privé de l'Etat. Dans la région d'Azzefoun, même la zone d'expansion des sites touristiques (Zest) n'a pas échappé aux bâtisseurs illicites. A Aït Chafaâ, des parcelles de terrain octroyées dans le passé à des particuliers pour des activités agricoles ont été bâties. D'autres ont été vendues à des prix dépassant 12 000 DA le mètre carré. L'importance stratégique du site attise les convoitises d'une faune de promoteurs sans foi ni loi. Aït Rhouna, plage du Petit paradis, route du phare de Sidi Korchi, des chantiers poussent sur le bas de la RN24 menant vers Béjaïa. Pourtant, la loi du 5 février 2002 pour la protection et la valorisation du littoral fixe une zone de non construction de 100 à 300 m, interdit l'extension longitudinale des agglomérations au-delà de 3 km et détermine les zones naturelles à protéger. Désarmés face à ce phénomène qui remonte aux années 1980, les élus locaux ont laissé faire. « Nous dressons des procès-verbaux sans suite », déplore le président de l'APC d'Azzefoun. Il n'en dira pas plus. Sollicitée pour plus d'informations, l'inspection de l'urbanisme de la daïra d'Azzefoun, nous renvoie vers la direction de l'urbanisme et de la construction (DUC) de la wilaya. Mêmes réponses évasives. Aucun avis à donner, ni statistiques sur les constructions illicites érigées dans la zone interdite du littoral. « Si nous avons procédé à la révision du plan directeur d'aménagement et d'urbanisme (PDAU) des communes côtières, c'est justement pour prendre en charge cet aspect de protection maritime. Nous essayons d'adapter les lois à la réalité du terrain », dira succinctement un chef de service. Toutes nos tentatives de « décrocher » un rendez-vous avec le directeur de la DUC, via la cellule de communication de la wilaya, ont été vaines. Un sujet tabou ? Pour le directeur du tourisme, « c'est à nous de dire si le terrain est situé à l'intérieur de la Zest. Tous les terrains privés titrés et toute transaction doivent faire l'objet d'exercice du droit de préemption de l'Etat ». Selon lui, le premier responsable sur un terrain donné c'est l'APC. « La loi du littoral est claire. Il y a une zone non constructible de 100 m sauf pour les constructions nécessitant proximité immédiate de la mer comme les stations de dessalement, etc. Cette bande peut aller jusqu'à 300 m, selon la nature du rivage. » En effet, la loi instaure une bande non aedificandi (non constructible) qui varie entre 100 et 300 m, protégée par les textes officiels, mais quelques exceptions autorisent la construction d'infrastructures liées à la mer. Objectif assigné à cette politique : sauvegarder le littoral qui doit être protégé, utilisé et mis en valeur en fonction de sa vocation. Les textes énoncent sans ambages l'obligation de préserver les ressources naturelles en général et la biodiversité.Plusieurs acteurs sont concernés sur papier par la protection du littoral en Algérie. Il s'agit notamment des services de l'environnement, de l'urbanisme, du tourisme, de la santé, des travaux publics, les communes, les garde-côtes et les services de la Protection civile. Tout le monde plaide pour la « cause » des espaces côtiers, mais sur le terrain la situation est tout autre. Avec ses 80 km de côtes, la wilaya de Tizi Ouzou offre plus de 727 ha de sites aménageables pouvant accueillir plus de 12 000 lits et drainer un flux théorique global de 30 000 baigneurs par jour. Huit Zest sont concentrées sur le littoral de la région, trois étant déjà susceptibles d'abriter des projets dignes d'intérêt. Il s'agit des zones d'Azzefoun, de Sidi Khelifa et de Tigzirt.