Comme à l'accoutumée, le Festival de la robe kabyle qu'abrite depuis neuf ans, à l'initiative de l'association culturelle Tagmats, le village Ihamziene, dans commune d'Illoula Oumalou, daïra de Bouzeguène, à une soixantaine de kilomètres au sud-est de Tizi Ouzou, a créé une animation particulière dans la région compte tenu de l'engouement des visiteurs pour les activités de cette manifestation organisée, cette année, en hommage à la chanteuse Malika Domrane. Le Festival a été clôturé, lundi, avec, à la clef, l'attribution des prix du concours de la meilleure robe kabyle, dont la première place est revenue à la couturière Zakia Dahmani, tandis que Tassadit Touati a pris la deuxième position, alors que Taklit Mesbahi a occupé la troisième loge. «Je suis heureuse de décrocher cette distinction», a déclaré Zakia Zakia Dahmani. Notons que ces trois lauréates ont été sélectionnées à l'issue d'un défilé de mode. «Les critères de sélection sont, entre autres, liés à l'authenticité des motifs, la qualité et les finitions de la couture ainsi que l'intérêt suscité auprès du public», nous a expliqué un membre du jury de sélection des lauréates du concours de la «Robe d'or». Durant deux journées, les participants à ce festival ont livré aux regards des visiteurs les multiples facettes de cet habit traditionnel à travers les stands mis en place dans l'enceinte de l'école primaire du village. Les couturières qui ont étalé leurs produits innovent toujours dans la confection de cet habit traditionnel car, chaque année, depuis la première édition de cette manifestation culturelle, il y a toujours de la nouveauté. On y trouve plein de modèles de robes traditionnelles, réalisées par des petites mains expertes de femmes venues de différentes localités de la Kabylie. «Les robes exposées sont toutes belles», ont laissé entendre plusieurs visiteurs qui ont sillonné les stands d'exposition. En outre, durant deux jours, toutes les femmes étaient vêtues de robes kabyles à Ihemzien. Des images extrêmes belles, car même les petites fillettes déambulaient dans la placette avec de splendides robes traditionnelles. Le village était en fête. «Cette activité contribue directement à promouvoir notre culture. Nous voulons faire découvrir aux jeunes générations ce patrimoine», nous a souligné Hakim Dahmani, président de l'association Tagmat, qui ajoute que cette manifestation culturelle est devenue une tradition compte tenu de l'impact suscité aussi bien dans la région qu'au niveau des communes limitrophes. Notre interlocuteur précise également que plus 15 femmes du village ont ouvert des ateliers de couture pour la confection de la robe kabyle. Il s'agit d'une activité qui connaît un engouement remarquable à Ihemziene, surtout lorsqu'on sait que le Fonds national de promotion de l'activité artisanale traditionnelle (FNPAAT) encourage ce genre d'activité. D'ailleurs, selon Linda Ameur, chef du bureau de promotion de l'artisanat au niveau de la direction du tourisme de la wilaya de Tizi Ouzou, pas moins de 20 femmes ont bénéficié de matériel de couture dans le cadre de l'aide octroyée par le FNPAAT pour la promotion des produits de l'artisanat traditionnel. La manifestation a été rehaussée notamment par la présence de Madjid Athmane, vice-président de l'APC d'Iloula Oumalou, des députés Mohand Arezki Hamdous et Leila Hadj Arab. Pour revenir au programme de ce festival, notons que du théâtre, de la poésie et du chant étaient au menu de cette manifestation. Ainsi, le concours de la meilleure chorale qui a regroupé une dizaine de troupes a été remporté par des jeunes choristes venus de la commune de Ouacifs, à 40 kilomètres au sud-est de Tizi Ouzou. Les organisateurs de ce festival ont également préparé une cérémonie de mariage traditionnel. Puis, un gala artistique a donné le ton à une grande soirée de clôture de l'événement avec des artistes qui ont gratifié le public de belles productions, à l'instar de Malika Domrane, Arezki Moussaoui, Kamel Igmane. Par ailleurs, outre les autres médias qui ont couvert l'événement, à l'image de Radio Tizi Ouzou, un plateau de Berbère Télévision a été mis en place pour une émission avec la chanteuse Malika Domrane. Des moments festifs ont couronné la manifestation qui s'est déroulée dans une ambiance conviviale. Enfin, la 9e édition du Festival de la robe kabyle d'Ihemziene a été clôturée en apothéose avec le pari réussi des organisateurs qui ont su initier une manifestation culturelle en mesure de sortir leur village de l'anonymat et de sa torpeur quotidienne. Il est, en somme, utile de rappeler que la commune d'Illoula Oumalou abrite plusieurs fêtes de village, comme celle de la figue qu'organisent les habitants de Lemsela et celle de la plante médicinale de Mezguene. Hommage La chanteuse Malika Domrane a eu droit à un vibrant hommage à l'occasion de la 9e édition du Festival de la robe kabyle qu'a initié l'association Tagmats d'Ihemziene. Outre les activités organisées en l'honneur de cette artiste, une émission TV (table ronde autour des valeurs de la robe kabyle et témoignages sur la vie et le parcours de Malika Domrane) a été réalisée durant le festival à l'école primaire du village en question. Elle sera diffusée sur la chaîne Berbère Télévision. Cette émission a été animée par Slimane Belharet et Ahmed Neghli. Des amies et anciennes camarades de Malika, au lycée, ont assisté à cette rencontre. Mme Selhi a rappelé les moments passés avec Malika Domrane, notamment durant leur scolarisation aux lycées Fatma N'Soumer et El Khensa de Tizi Ouzou. «J'ai connu Malika au lycée où on avait fait des chansons et monté même des pièces de théâtre. Malika est une femme courageuse. D'ailleurs, je suis très fière de l'avoir connue», a-t-elle dit. De son côté, Kaïssa Raâb, amie de la chanteuse, a parlé aussi des moments d'amitié qu'elle a partagés avec Domrane qui était, a-t-elle raconté, une femme militante qui a grandement contribué au combat identitaire. Pour Arezki Moussaoui, Malika Domrane a apporté beaucoup à la chanson kabyle. «Elle a une voix unique. Elle était plus militante qu'artiste», a-t-il ajouté. Hamid Aït Ali, journaliste à Radio Gazelle de Marseille, et Mokrane Nessah, président de l'association Mouloud Feraoun de Tizi Hibel, village natal de l'artiste, ont parlé des qualités artistiques de la perle d'Ath Douala. Cette dernière a, elle aussi, revisité avec son public composé essentiellement de femmes son parcours. «J'aime chanter, et ce, depuis ma tendre enfance. Je fredonnais des chansons quand j'étais à l'école primaire de mon village. Et aux lycées Fatma N'Soumer et El Khensa de Tizi Ouzou, nous avons créé une chorale. Au lycée, j'ai eu conscience de la revendication identitaire. D'ailleurs, je me suis servi de la chanson comme arme pour défendre notre culture. J'envoyais des lettres à Slimane Azem, Bessaoud Mohand Arav et Taoues Amrouche. Je peux dire que c'est le combat identitaire qui m'a poussée à la chanson tout comme Lounès Matoub», a-t-elle témoigné tout en rendant hommage à tous ceux qui l'ont aidée dans son parcours artistique, notamment Mohamed Benhanafi qui était une véritable école pour de nombreux artistes de sa génération.