Le président Mahmoud Ahmadinejad, candidat à sa propre succession à l'élection présidentielle iranienne du 12 juin prochain, vient de recevoir un soutien discret mais néanmoins de poids du guide de la Révolution iranienne, l'ayatollah Ali Khamenei. « Il vaut mieux choisir quelqu'un qui comprend les problèmes des gens, qui vient du peuple et qui ne cherche pas l'aristocratie », a déclaré le guide de la Révolution iranienne dans un discours retransmis en direct par la télévision d'Etat. Ce profil de candidat autour duquel l'ayatollah Ali Khamenei a appelé les électeurs iraniens à se mobiliser pour lui renouveler leur confiance pour un second mandat va, de l'avis des observateurs, comme un gant au candidat ultraconservateur sortant Mahmoud Ahmadinejad. Ali Khamenei s'était déjà positionné en faveur de la candidature de M. Ahmadinejad, dont il a défendu le bilan du gouvernement contre les attaques de ses adversaires, principalement des autres candidats en lice pour la présidentielle. Quand on connaît le poids politique et moral du guide de la Révolution dans la vie institutionnelle du pays, on mesure la portée et l'impact que pourraient avoir des déclarations du guide de la Révolution sur l'électorat. Les jeux sont-ils déjà faits ? Mais au-delà de ces considérations de politique intérieure, y a-t-il un message politique à saisir de ce soutien précieux que vient de recevoir le président Ahmadinejad ? En soutenant la candidature ultraconservatrice du candidat sortant qui se définit comme le candidat des pauvres et des déshérités, le guide iranien envoie-t-il un message aux dirigeants iraniens qui ont tendance à s'éloigner des préoccupations du peuple et à placer leurs intérêts personnels au-dessus de ceux de la population ? Ou bien le message est-il destiné plutôt à la consommation extérieure ? Aux Américains avec lesquels l'Iran n'en finit pas de solder des comptes liés au dossier du nucléaire iranien sur lequel le président Ahmadinejad, qui n'est que l'ombre du régime, est resté jusqu'ici inflexible. Ahmadinejad qui est la bête la plus noire que l'Iran ait pu produire à un tel niveau de responsabilité n'est sans doute pas le meilleur candidat dont les Américains pouvaient rêver pour l'Iran. Washington autant que les autres capitales occidentales fondent beaucoup d'espoirs de changement à la tête de l'Exécutif iranien lors du prochain scrutin. Cette déclaration de l'ayatollah Khamenei vient de balayer tous ces espoirs. Il reste à savoir ce qui a motivé cette décision du guide de la Révolution de jouer la carte peu vendable à l'extérieur, auprès des Occidentaux et des Américains, de Mahmoud Ahmadinejad. L'arrivée du président Obama aux affaires à Washington et sa volonté proclamée d'ouvrir une nouvelle ère dans les relations entre les Etats-Unis et l'Iran, en respectant le choix du peuple et en apurant les contentieux opposant les deux pays, y est-elle pour quelque chose dans cette sérénité qu'affiche le régime iranien pour reconduire une équipe gouvernementale dont le moins que l'on puisse dire est qu'elle n'aura pas laissé indifférents à l'extérieur ? Ahmadinejad est-il devenu au regard des nouvelles données géopolitiques américaines fréquentable pour ne plus représenter un danger pour la stratégie de l'Administration d'Obama de refondation des relations internationales ? Le président Ahmadinejad qui a mis tout son poids pour peser dans le procès de la journaliste irano-américaine Roxana Saberi, accusée d'espionnage au profit des Etats-Unis, laquelle a bénéficié d'un verdict jugé clément et politique de deux ans avec sursis alors que le procureur avait requis une peine d'emprisonnement de 8 ans, participe de cette atmosphère de dégel des relations entre les deux pays inaugurée avec l'arrivée d'Obama au pouvoir.