Le président américain Barack Obama multiple les déclarations donnant une certaine lisibilité à ce qui pourrait devenir la politique proche-orientale de son pays. Lui-même le laisse entendre en affichant sa nette volonté de revoir certaines situations que l'on croyait immuables. Ainsi, en est-il du conflit du proche-orient, mais en aucun cas de la relation Etats-Unis-Israël. A propos du premier, le président américain déclare vouloir « remettre sérieusement sur les rails » les négociations sur sa résolution. Plus précisément, et alors que le monde se montre réservé sur de tels propos, il affirmera, dans une interview à la radio-télévision britannique BBC diffusée hier que les Etats-Unis « vont être capables de remettre sérieusement les négociations sur les rails ». Une réponse en quelque sorte aux sceptiques et à tous ceux qui demandent à juger sur pièces, alors que lui et son administration ont réaffirmé leur détermination à ne plus temporiser. La raison en est bien simple, et c'est encore lui qui l'avance : « C'est non seulement dans l'intérêt des Palestiniens d'avoir un Etat, mais c'est également dans l'intérêt des Israéliens que la situation se stabilise... Et c'est dans l'intérêt des Etats-Unis que nous ayons deux Etats vivant côte à côte en paix et en sécurité ». Il entend se donner les moyens pour faire valoir ce faisceau d'intérêts dont il ne doute plus de la convergence, puisqu'il faut parler ainsi. Et là, il ne cache pas la nécessité d'une certaine fermeté envers Israël sur la création d'un Etat palestinien et la colonisation dans les Territoires. De tels propos, il les a tenus à la radio publique américaine NPR. M. Obama a justifié cette fermeté par le fait que la tendance générale actuelle dans la région était « profondément négative » pour les intérêts israéliens et américains. « Les Etats-Unis ont une relation particulière avec Israël, cela ne fait aucun doute », a dit M. Obama à la radio NPR qui l'interrogeait sur le sentiment éprouvé par beaucoup au Proche-Orient d'un parti-pris quasiment aveugle des Etats-Unis en faveur d'Israël. Il a évoqué les appels régulièrement proférés dans la région à l'annihilation d'Israël, appels d'organisations radicales ou de dirigeants comme le président iranien Mahmoud Ahmadinejad. « Quand on a dit cela, ce qui est également vrai, c'est qu'être amis, cela signifie aussi être honnêtes. Et je pense qu'il y a eu des moments où nous n'avons pas été aussi honnêtes que nous le devrions sur le fait que la direction actuelle, la trajectoire actuelle dans la région, est profondément négative, non seulement pour les intérêts israéliens mais aussi pour les intérêts américains », a-t-il déclaré. « Je ne pense pas que nous devions modifier le soutien ferme que les Etats-Unis apportent à Israël », a précisé M. Obama qui a pris l'avion hier pour son premier séjour de président au Proche-Orient. Mais « nous devons maintenir une foi constante dans la possibilité de négociations menant à la paix. Et, selon moi, cela nécessite une solution à deux Etats. Cela nécessite que de chaque côté, israélien et palestinien, on honore ses obligations », a-t-il indiqué. « J'ai dit très clairement aux Israéliens, en privé et en public, qu'un gel de la colonisation, croissance naturelle incluse, fait partie de ces obligations », a-t-il dit, signifiant par là qu'il rejette l'argument de l'accroissement démographique pour justifier une extension des colonies dans les Territoires palestiniens. Au moment où Israël, en guise de réponse, lui demande de respecter les engagements pris par son prédécesseur, George W. Bush, Obama donne la nette impression de s'en démarquer, affichant même une certaine rupture par rapport à la politique proche-orientale de ces dernières années. Pour la première fois et depuis bien longtemps, un président américain a clairement fait valoir les intérêts nationaux des Etats-Unis, et qu'il ne permettait pas qu'ils soient compromis, même par un proche allié. Ce qui implique l'étape suivante, et visiblement, il n'hésite pas à dévoiler à ce qui tient lieu de stratégie de persuasion. M. Obama a plaidé pour la patience. « La diplomatie, c'est toujours un travail de longue haleine. Les résultats ne viennent jamais rapidement », a-t-il répondu, indiquant appliquer le même principe à l'Iran. « Ce que j'ai dit, c'est qu'il est dans les intérêts du monde que l'Iran mette de côté ses ambitions en vue de posséder l'arme nucléaire. » Le meilleur moyen d'y arriver est d'utiliser « la diplomatie directe », a estimé M. Obama. « Je ne veux pas fixer de calendrier artificiel mais nous voulons nous assurer que, d'ici à la fin de l'année, nous pourrons voir évoluer sérieusement un processus permettant d'aller de l'avant. » Sur un autre plan, et cela constitue une autre rupture avec la politique suivie par son prédécesseur, il a averti que les Etats-Unis ne pouvaient pas imposer leurs valeurs aux autres pays. « Le danger, je pense, c'est quand les Etats-Unis ou un pays quelconque pensent que nous pouvons simplement imposer ces valeurs à un autre pays, qui a une histoire différente et une culture différente », a-t-il déclaré. Mais « je pense que la chose que nous pouvons faire avant tout, c'est donner le bon exemple. C'est pourquoi, fermer Guantanamo, de mon point de vue, aussi difficile que ce soit, est important », a-t-il ajouté. Evoquant le discours très attendu qu'il prononcera demain au Caire, M. Obama a averti qu'un « seul discours ne va pas résoudre tous les problèmes » mais estimé que son déplacement dans les pays musulmans représentait « une opportunité pour nous de faire en sorte que les deux parties s'écoutent un peu plus et, espérons-le, d'apprendre quelque chose ». Le terrain est déblayé pour cette intervention qui se veut majeure, car là aussi, elle intervient pour la première fois. Et parce qu'il faut que les choses apparaissent, le monde musulman a affiché ses attentes. La conférence ministérielle de l'OCI (organisation de la conférence islamique) qui vient de se tenir à Damas, en a fait l'énumération, même de manière incomplète.