Le président Mahmoud Ahmadinejad, dont la réélection contestée a provoqué la plus grave crise en 30 ans en Iran, présentera aujourd'hui son nouveau gouvernement ouvert pour la première fois à des femmes et dont la composition inquiète déjà certains de ses amis conservateurs. M. Ahmadinejad doit présenter la liste de son gouvernement au Parlement, qui doit théoriquement la rendre publique dimanche prochain. Mais le président a décidé de justifier son choix à la télévision dès ce soir, et a déjà livré quelques noms dès dimanche. Certains de ces noms sont un défi aux exigences du camp conservateur. Un des principaux députés de ce camp, Akhmad Tavakoli, souvent critique à l'égard du président, a déclaré hier que « à en juger par les six noms présentés, on peut supposer que le cabinet ne satisfera pas à l'exigence d'un gouvernement efficace et ce n'est pas un bon signe », selon l'agence Isna. Risque de « fitna » au sein de la majorité Le président souhaite confirmer dans leurs postes les ministres de l'Industrie, Ali Akbar Mehrabian, et de l'Economie, Shamseddine Hosseini. M. Ahmadinejad avait notamment eu du mal à obtenir un vote de confiance en 2007 pour M. Mehrabian, jugé peu qualifié pour occuper un poste-clé, tout comme M. Hosseini à sa nomination en 2008. Chaque ministre doit obtenir la confiance des députés lors d'un vote à la majorité simple. Le président a aussi proposé un fidèle pour occuper le poste sensible des Renseignements, Heydar Moslehi, en remplacement de Gholam Hossein Mohsen Ejeie, limogé début août. Un membre influent de la commission de la Sécurité nationale du Parlement, Hassan Sobhaninia, a critiqué ce choix mardi. « Selon la loi, le ministre des Renseignements doit être un mojtahed (religieux apte à interpréter la charia), mais le choix du président ne remplit pas cette condition », a dit ce député sur le site du Parlement. M. Ahmadinejad a été réélu au premier tour de la présidentielle du 12 juin, mais ses adversaires modérés et réformateurs ont contesté sa légitimité en dénonçant une fraude massive. L'élection a été suivie par des manifestations sans précédent depuis la fondation de la République islamique en 1979. Après avoir prêté serment le 5 août devant le Parlement, M. Ahmadinejad a affirmé que le nombre de jeunes ministres dans son prochain cabinet serait « sans précédent ». Dans une lettre, 202 députés iraniens, sur 290, lui avaient demandé de choisir des ministres « capables », « révolutionnaires » et « expérimentés ». Sa réélection contestée ainsi que sa façon de gouverner en privilégiant la fidélité à sa personne, divisent le camp conservateur, majoritaire au Parlement. Des députés ont protesté contre l'annonce publique par le président dimanche de certains de ses candidats pour le futur gouvernement. M. Tavakoli a interprété ce geste comme une « façon pour le gouvernement d'exercer une pression sur le Parlement », toujours selon Isna. Outre MM. Mehrabian, Hosseini et Moslehi, le président a créé la surprise en annonçant que son futur cabinet comporterait au moins trois femmes. Si elles obtiennent la confiance du Parlement, elles seront les premières femmes ministres de l'histoire du régime. M. Ahmadinejad a évoqué les noms de Fatemeh Adjorlou pour le ministère de la Protection et des Affaires sociales et de Marzieh Vahid Dastjerdi pour la Santé. M. Tavakoli a critiqué le choix de Mme Adjorlou, en remarquant qu'elle avait un diplôme en psychologie clinique : « Comment peut-on confier un ministère aussi important à quelqu'un ayant une spécialité sans rapport avec celui-ci ? »