Humour et révélation », caractérise bien la prestation à Oran, à l'auditorium de l'USTO, donnée par le chanteur français Aldebert qui, malgré (ou peut-être grâce à) ses Enfantillages, titre de son dernier album dont il a interprété plusieurs morceaux, a pu enchanter un public tombé sous le charme, dès les premiers accords de guitare. Etats d'âme, souvenirs d'enfance et satires de « petits monstres » jalonnent les textes de cet artiste qui regarde peut-être encore le monde par le prisme du paradis perdu de la tendre jeunesse. « Je garde en mémoire le rituel du film du soir/de mon père qui riait à gorge déployée/ Du grand blond, de sa chaussure noire/Allez mon grand, il est tard, va vite te coucher », chante-t-il dans Dis moi dimanche (extrait de L'Année du Singe), une des deux chansons avec lesquelles il a entamé son show avant de s'adresser au public. Se coucher, il n'en est pas question. Avec lui, toujours tête en l'air et des pieds qui ont du mal à toucher le plancher de la scène, à force de sautiller, il n'y aura pas de répit. « Je vais maintenant vous interpréter une chanson qui parle d'un mariage à la française avec ses petites habitudes, etc », annonce-t-il pour Mariage T' reggae (extrait de Plateau Télé) et dont le refrain sonne comme une sentence : « Les mariages sont souvent très beaux, mais jamais très gais/ Dans le décalage entre ce que l'on vaut et ce que l'on promet/On est souvent plus près du faux que du vrai ». Il utilisera très souvent la rythmique reggae pour habiller certaines de ses mélodies valsées, ce qui donne un cachet particulier aux thèmes développés comme dans Les Oiseaux dans les grands magasins, mais surtout dans la Méthode couette (album Sur place ou à emporter), son manifeste pour le parti du moindre effort qui clame que « pour vivre heureux, vivons couchés (…) car tout vient à point à qui sait se détendre ». Dans cette ambiance bon enfant, l'un de ses musiciens (trois pour ce spectacle), Christophe troquera plusieurs fois son clavier pour un bel accordéon, en particulier pour La plage, ce rituel des habitants de Besançon dont l'artiste est originaire. Une petite chanson d'amour pleine de tendresse et un peu ordinaire mais que l'auteur habille avec un jeu de scène, une théâtralisation satirique pour accompagner des mots tels que « J'aime sa façon de faire des petits sauts/Pour éviter les vagues en entrant dans l'eau/Je me vois au ralenti courir dans le décor/Avec un standard de Barry en fond sonore. » Aldebert est prêt à tout pour amuser la galerie, y compris en insérant (dans Adulescent, adulte et ado en même temps pour s'inquiéter du temps qui passe) un des grands succès européens des années 1980 que le public allait reprendre en chœur : Voyage, voyage de Desireless. Le retour aux gestes du quotidien se fera avec La complainte de L'ex-fumeur. « Dans le renoncement du vice/Tout le monde m'a félicité/A part Philippe et Morris », ironise-t-il avant d'entamer, quatre de ses « enfantillages » plus loin, la Dame aux camel light (tiré de Sur place ou à emporter). Mais là, c'est une toute autre histoire qu'il raconte, celle de Marguerite qui finira par le serrer dans ses bras, une fin heureuse comme dans un conte de fées.