Ils se retrouvent souvent dans l'obligation de s'endetter pour pouvoir boucler les fins de mois, surtout en cas d'imprévus. Cette année sera d'autant plus difficile à gérer avec les hausses annoncées des prix, que ce soit pour les services, l'alimentation ou l'habillement. Déjà que le fossé entre le salaire moyen en Algérie et le salaire nécessaire pour vivre est important, ce dernier va se creuser davantage cette année. En 2014, l'Office national des statistiques (ONS) évaluait le salaire moyen à 37 800 DA contre 36 100 DA en 2013 et 31 800 DA en 2012. Dans une étude élaborée sur le pouvoir d'achat au cours de cette dernière année, l'Union générale des travailleurs algériens (UGTA) estimait à 38 000 DA le budget familial pour une famille de quatre personnes, soit une différence de 6200 DA entre le réel et le nécessaire. Ce n'est que deux ans plus tard (en 2014) que le salaire moyen (37 800 DA) a avoisiné le budget indispensable (38 000 DA), tel que souligné dans l'étude de l'UGTA. Si une autre étude avait été effectuée dans ce cadre, le montant aurait sans nul doute été revu à la hausse vu l'ascension prise par les prix entre 2012 et 2014. Une tendance poursuivie entre 2012 et 2016 puisque l'inflation n'a pas été inhibée, surtout dans le cas des produits alimentaires. Cette catégorie accapare d'ailleurs une bonne partie des revenus des ménages, 41,80% selon la dernière enquête de l'ONS sur la répartition des revenus. Exemple, un salarié qui perçoit 50 000 DA consacre 21 000 DA pour le volet alimentaire alors que le reste 29 000 DA va aux transports, habillement, logement et autres. Peu de place aux loisirs et même aux soins dans l'organigramme des dépenses. La situation va en se détériorant. Les syndicalistes ne manquent pas de le souligner, à l'image de Meziane Meriane, du Syndicat national autonome des professeurs d'enseignement secondaire et technique (SNAPEST) : «Le minimum pour les besoins journaliers d'une famille de 4 personnes est de 1500 DA, ce qui nous donne mensuellement un besoin d'environ 50 000 DA qui est très loin du Smig», relève M. Meriane. Et de s'interroger : «Alors que le besoin minimum est de plus de 1500 DA quotidiennement, comment peut-on subsister avec un salaire journalier de 600 DA pour un smicard avec les augmentations annoncées ?» Pour M. Meriane, le minimum nécessaire doit être de 2000 DA. Soit l'équivalent d'un salaire minimum de 60 000 DA. «Il est intolérable que le salaire d'une journée d'un député et des hauts cadres soit équivalent à un salaire mensuel d'un fonctionnaire smicard», regrette notre syndicaliste parlant dans le même sillage de la paupérisation croissante de la population non sans avertir : «Nous serons intransigeants sur la remise en cause des acquis sociaux.» «Non à la remise en cause des acquis sociaux» Pour sa part, Lyes Merabet, du Syndicat national des praticiens de santé publique (SNPSP), estime que le salaire minimum pour commencer la carrière d'un médecin à 100 000 DA vu les conditions actuelles. Au rythme de l'inflation constante, de la dévaluation du dinar, de l'augmentation des taxes directes et indirectes, il faudrait un salaire minimum de 100 000 da pour commencer sa carrière. Des salaires en dinars, une consommation en devises «Nous consommons en euros ou en dollars et les taux de change parallèle sont respectivement de 18 et de 16», expliquera-t-il. «Dans les années 80', un médecin généraliste entamait sa carrière de fonctionnaire avec 7000 DA. Ce qui égalait un peu plus de 6 fois le snmg. Aujourd'hui, le salaire d'un débutant est de 46 000 DA pour un SNMG de 18 000 DA, soit 2,5 fois», résumera encore le Dr Merabet. Et de regretter le manque d'objectivité dans les décisions adoptées par le gouvernement. «Ces décisions manqueront d'objectivité tant que la valeur de la monnaie est administrée par le politique, tant que les indicateurs économiques sont le produit de la rente pétrolière, tant que la maîtrise de la courbe de l'inflation est absente, et enfin tant que le secteur de l'informel et de la spéculation continuera à gérer les marchés internes», notera-t-il. Une situation qui nécessite, selon le représentant du SNPSP, une concertation entre les syndicats. «La situation est complexe à plusieurs niveaux et plus que jamais tout le monde est interpellé», conclura-t-il. En attendant que cette concertation se mette en place, certains syndicats ont commencé à lancer des actions au niveau régional. C'est le cas du Syndicat national autonome des personnels de l'administration publique (Snapap). Ce dernier, dans un communiqué rendu public, appelle les citoyens et les travailleurs à participer massivement à une journée de protestation suivie d'une marche le 20 janvier prochain à Béjaïa pour protester notamment contre la loi de finances 2016 et dénoncer «la misère qui frappe les travailleurs». Une politique salariale en faveur du pouvoir d'achat, la réduction de l'impôt sur le revenu global (IRG) en sont les principales revendications.