Khalil Al Doulaïmi, l'avocat de Saddam Hussein, publie un livre où il raconte les dernières heures du raïs(*). L'auteur affirme que le Président irakien a été victime d'un lynchage. Khalil Al-Doulaïmi aime Saddam Hussein. Lorsqu'il évoque l'ancien président irakien, exécuté le 30 décembre 2006, il vibre de toute sa fibre nationaliste. « Grâce à lui, l'Irak, mosaïque ethnique et confessionnelle, dominait le monde arabe », affirme-t-il encore aujourd'hui. « Avant de devenir son avocat, je n'étais pas proche de lui. Mais c'était lePrésident légitime de l'Irak, c'est pour cela que j'ai choisi de le défendre. » Son ouvrage est à son image. Saddam, les secrets d'une mise à mort livrés par son avocat (éditions Sand) manque cruellement de recul mais son témoignage est inédit et donne du matériau aux historiens sur la fin du raïs. Doulaïmi raconte sa version de l'exécution du président déchu, et c'est cette partie du livre qui est la plus intéressante dans la mesure où elle diffère du récit officiel de la pendaison de Saddam Hussein. Après avoir refusé les neuroleptiques que lui proposait son dentiste, explique l'avocat, Saddam a dit adieu à ses deux frères, Barzan et Sabaoui, eux aussi emprisonnés, avant d'être transféré en hélicoptère par ses gardiens américains dans un camp militaire mixte, occupé en partie par les milices chiites. Livré à ces dernières, ses pires ennemis, il aurait été accueilli dans la salle d'exécution par le jeune imam Moqtada Sadr, fils et petit-fils de dignitaires religieux chiites assassinés sur son ordre, avec cette phrase : « Comment vas-tu, tyran ? » Saddam, dit Doulaïmi, « le regarda avec mépris, et l'un des gardiens le frappa à la tête de la crosse de son fusil ». Puis le condamné se mit à hurler : « Vive le peuple ! Vive l'Irak ! Vive la Palestine arabe ! À bas les Perses et leurs agents ! » L'avocat Al-Doulaïmi rapporte d'autres détails. A l'en croire, la corde « remise aux Américains par un soldat sioniste » devant un autre « soldat américain d'origine juive » était volontairement trop longue. Elle aurait mesuré 39 pouces… pour symboliser la « haine des sionistes », après que Saddam eut lancé 39 missiles contre Tel-Aviv. A nouveau tabassé et copieusement injurié, Saddam Hussein est placé au-dessus d'une trappe carrée et refuse qu'on lui bande les yeux. Un photographe prend des clichés, un milicien filme la scène avec son téléphone portable. Quelqu'un crie : « Va en enfer ! » Lui, répond : « Au paradis, inch'Allah, je suis un martyr ! » On serre le nœud autour de son cou, et la trappe s'ouvre. Si l'on en croit Doulaïmi, la corde aurait été « délibérément allongée pour qu'il tombe par terre encore en vie et qu'on puisse le tuer en le frappant. Effectivement, le président releva la tête en souriant. Ils se mirent tous à le piétiner et à le frapper jusqu'à ce que mort s'ensuive, puis ils raccrochèrent le cadavre au gibet pour donner l'illusion ». Emmené au domicile d'un chef de l'armée du Mahdi, la milice de Sadr, le corps sans vie du dictateur aurait été lardé de coups de poignard et égorgé avant d'être remis aux Américains. Ces derniers firent procéder à son enterrement, le lendemain, à 3h du matin, à Al-Ouja, son village natal, en présence des chioukh en pleurs de la tribu Abou Naceur. Problème : Me Doulaïmi ne pouvait être présent lors de la pendaison, selon ses propres aveux. Qui lui aurait raconté cette horrible scène alors ? Qui sont ses témoins ? L'auteur ne le dit pas. (*) Saddam, les secrets d'une mise à mort livrés par son avocat, éditions Sand, 288 p.