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Milan Kundera, la vie est ailleurs
La mort rêvée des poètes
Publié dans El Watan le 17 - 03 - 2005

Titre d'un beau roman de Milan Kundera. Roman difficile à lire, sans trame narrative visible et continue, grinçant des mots qui rendent illusoire le récit qui semble se faire sans se faire, comme s'il était truqué.
Technique d'écriture géniale qui illustre peut-être déjà le titre : la vie, celle qui est censée être racontée, est ailleurs. Où ? La Vie est ailleurs, raconte l'histoire de Jaromil, un poète, un vrai poète même s'il n'a pas de talent. Jaromil est un poète parce qu'il est d'une innocence totale qui le rend parfois ridicule et toujours terriblement touchant. Ce poète est pris au piège de l'histoire de son pays, la Tchécoslovaquie, entre les années 1930 et celles qui ont suivi le Printemps de Prague. Printemps d'une ville et d'un pays en instance de renouveau. Mais on sait combien les promesses du temps sont trompeuses. La germination est étouffée dans l'œuf et l'âge lyrique - c'était le premier titre choisi par Kundera -, sommé de mettre un bémol à ses envolées. Alors que reste-t-il à faire dans un monde dévoré par la violence liberticide, dévasté par la désespérance ? Tenter de rire en songeant à une épopée héroïque, se moquer tendrement de tout ce à quoi on tient : l'enfance, la révolution. Tout ce qui ne peut pas être, sauf à être ailleurs. Où ? La Vie est ailleurs est un livre politique dans la mesure où Kundera pose un regard pénétrant sur l'histoire et la politique de son pays. Il peut en parler, il les a subies en tant que victime. Il en témoigne. Mais l'esprit de sa dissidence ne s'arrête pas là. Par-delà une conjoncture précise, l'écrivain tchèque s'attaque à l'idée même de la politique, celle que Valéry appelle l'idole. Iconoclaste, Kundera s'attaque à toutes ces histoires du monde, confondues dans l'espace et dans le temps, qu'il traite sur le mode de la dérision pour en faire une gigantesque tragi-comédie. L'histoire pourrait être une vaste plaisanterie, et dans ce cas, le poète est irrémédiablement condamné à ne pas y trouver sa place, il prend les choses trop au sérieux. Entre le poète et le monde, un miroir trompeur et déformant. S'il traverse l'écran et s'avise de mettre le pied de l'autre côté, ailleurs que l'ailleurs où il est, il meurt. Lermontov, Pouchkine, Maïakovski, Shelley, Byron, Lautréamont, Rilke, Rimbaud, et même ce Jaromil, poète raté de La Vie est ailleurs : tous présentent un défaut de fabrication inné. Chez eux, « l'anatomie a perdu l'esprit », ils ne sont qu'« un cœur qui gronde ». Le poète cherche une occasion de concrétiser ses élans mais la vie se dérobe et propose la mort. Mort par balle, par l'eau, par le feu, par le béton contre lequel on vient donner du front.
Les cris des suppliciés
Un jour de 1957, Djamal Amrani est sorti de chez lui. Il avait vingt ans, l'âge lyrique, le bel âge pour devenir le témoin d'une histoire tragi-comique. Il est embarqué par l'armée française, conduit au centre de torture, accueilli par les chansons de Gloria Lasso et Gilbert Bécaud. C'est à qui gueulera le plus fort dans les haut-parleurs pour couvrir les cris des suppliciés par l'eau de la baignoire, le feu de la gégène, en attendant les balles qui descendent le frère de Djamal, en attendant peut-être le béton sur lequel vient chuter le corps de son beau-frère. En attendant, Djamal se cogne la tête contre les murs entre deux séances de torture. Il y a de quoi, c'est sûr. Aux interrogatoires, il fait tout juste. Qu'est-ce que Montaigne a écrit ? Les Essais. Coup de poing sur la figure. Et Montesquieu ? Les Lettres persanes en 1721. Coup de poing sur la figure. Et puis ? Consideration sur les causes de la grandeur des Romains et de leur décadence. Et puis, coup de poing sur la figure L'Esprit des lois. Sale bicot qui parle de décadence et des lois, et même de leur esprit. Le bourreau cogne, et la victime trouve que c'est injuste, parce qu'elle a répondu tout juste à toutes les questions. Alors la victime se cogne les murs de sa cellule en attendant la prochaine séance. Une quarantaine d'années plus tard, Djamal Amrani se cogne la tête contre la question de sa mort. « Quel est le poète qui n'a pas rêvé sa mort ? Quel est le poète qui ne l'a pas imaginée ? » L'eau ? Probablement pas. Seules Ophélie ou Virginia Woolf meurent bien, noyées, immergées lentement, volontairement, jusque par-dessus leur tête, comme dans les profondeurs de leurs tourbillons intérieurs. Non, Djamal ne la sent pas bien cette histoire d'eau. Il imagine mieux les balles qui tuent Tahar Djaout, ou le couteau silencieux qui frappe Youcef Sebti. En attendant, il continue à se taper la tête contre les murs. Quarante années et plus, d'une histoire et d'une politique tragique dont il est le témoin et la victime. Presque un demi-siècle durant lequel l'idole dérisoire s'est gonflée comme un ballon que la poésie peut vider de son air vicié. Derrière les vitrines de l'univers, le poète voit mieux, à distance critique et raisonnable du monde dévastateur. Mystère de la destinée exceptionnelle du vrai poète qui n'est jamais un salaud. Comment expliquer le miracle de sa naissance ?
Par quelle nuit
Délirante
Fébrile
Quels Goliaths (l') conçu si grand
Et tellement inutile ?
Grand. Inutile ? Où ?
Où que tu sois, ailleurs,
salut ! Djamal.


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