Le mouvement populaire se porte bien à Sidi Bel Abbès Après dix semaines de protestation, les manifestants demeurent toujours aussi mobilisés à Sidi Bel Abbès pour le départ de tous les symboles du régime Bouteflika. Des milliers de citoyens ont encore marché hier à travers les principales artères de la ville. Ils se sont, comme à l'accoutumée, rassemblés vers 14h à la place principale du 1er Novembre (ex-Carnot), où un tifo géant vert, blanc et rouge, aux couleurs de l'emblème national, a été déployé par des centaines de citoyens. Il a été confectionné et mis en place par de jeunes manifestants pour marquer la symbolique de cette Révolution du sourire qui ne cesse d'étonner de par la créativité de ses principaux animateurs. «L'idée a germé la semaine passée lors du spectacle de rue Jib fenek (Ramène ton art et rejoins nous, ndlr). Jib fenek est un espace de libre parole qu'animent chaque jeudi des artistes et des étudiants des Beaux-arts sur la place Carnot», explique Abbès, l'inévitable homme de théâtre du centre de la ville. Lui et ses amis du hirak ont encore démontré hier, aux côtés des manifestants, un grand sens de l'organisation et un degré élevé de conscience politique. Des manifestants venus avec des pancartes sur lesquelles était écrit : «FLN au musée», «Algérie libre et démocratique», «Sortons tous pour qu'ils partent tous». «Chaab yourid tjibou Saïd» (Le peuple veut juger Saïd Bouteflika), «Tetnahaw ga3» (Dégagez tous), «Ni Gaïd, ni Bensalah, ni le gouvernement de Bedoui», «Tethasbou ga3» (Vous allez tous devoir rendre des comptes) sont, entre autres, les slogans scandés par une impressionnante foule composée de femmes, de personnes âgées et de beaucoup de jeunes. M. Abdelkrim «Les manœuvres du pouvoir» dénoncées à Chlef Les manifestations pour la rupture radicale avec le système se poursuivent au chef-lieu de wilaya avec plus de détermination et d'engagement. Cependant, une certaine confusion a régné au début de la marche hier, certains «organisateurs» voulaient cantonner le mouvement au niveau de la place de la Solidarité, au centre de Chlef, alors que d'autres demandaient aux manifestants de poursuivre leur marche le long des principales artères de la ville, comme ils avaient l'habitude de le faire chaque vendredi. Finalement, les défenseurs de cette dernière option ont fini par l'emporter en suscitant l'adhésion la plus large des citoyens à la marche organisée au siège de la wilaya. Il y avait des familles accompagnées de leurs enfants, des personnes âgées, des jeunes ainsi que des fonctionnaires et travailleurs de différents secteurs.Les manifestants ont réitéré les mêmes slogans politiques relatifs au départ de tout le système en place et la poursuite en justice, sans distinction, de tous les symboles du régime ayant trahi le serment et les sacrifices des chouhada et la confiance du peuple. Parmi les autres slogans qui ont le plus retenu l'attention, il y avait ceux répétés d'une même voix par les protestataires comme : «Nous ne permettrons pas la division de notre peuple», «Les Algériens sont plus que jamais unis pour faire face à toutes les tentatives de division».A. Yechkour Grande détermination à Relizane Les boulevards de l'ALN, Khemisti, Larbi Tebessi et autres se sont avérés exigus pour contenir les imposantes foules sorties pour leur 10e vendredi consécutif afin de réclamer le départ de tous les symboles de l'ère bouteflikienne. «Nous ne dévions pas d'un iota de notre objectif, nous sommes décidés à nous maintenir sur cette ligne jusqu'à ce qu'ils partent tous», a crié la forte masse. «Nous ne voulons plus de ces figures qui ont ruiné le pays et ce ne sont pas les scènes de présentation de certains devant la justice qui vont nous détourner de notre action», a tempêté un jeune avec force, en ajoutant : «Nous ne pouvons aller vers des élections justes et transparentes sous le règne de ce gouvernement dont on demande le départ.» «Notre combat est pour la libération de notre pays des griffes de ces prédateurs qui ont détruit son économie et envoyé ses enfants mourir en mer», a dénoncé un autre, en poursuivant : «Les âmes de tous les harraga perdus vous poursuivront jusque dans l'au-delà.» Lors de la marche colorée par les emblèmes nationaux et banderoles portant des écrits appelant à «l'unité du pays», des appels ont été lancés pour «l'ouverture d'enquêtes approfondies sur la mafia du foncier et sur les dilapidations des deniers publics». Issac B. Marée humaine à Tiaret La marche de vendredi a été à la hauteur des attentes de nombreux Tiarétis. Une marche qui reste une réussite, parce qu'«il faut maintenir cette pression», déclare Mohamed, un cadre à la retraite. Il était 14h et l'impatience gagnait quelques esprits, lorsque la place de l'Indépendance, jusqu'au bas de la séculaire et mythique source Aïn El Kerma, a commencé à se remplir. Au fur et à mesure que les minutes s'égrenaient, la foule devenait dense, jusqu'à l'arrivée successive de plusieurs carrés de marcheurs. Une marée humaine a déferlé. On l'aura vite compris, le peuple d'en bas ne veut rien lâcher. Bien plus par la sérénité et sa farouche détermination, ponctuée par plusieurs slogans, il venait de signifier sa réponse à ceux qui continuent de tisser, en haut, des intrigues pour l'amener à abandonner. La marche d'hier a été non seulement imposante, mais à partir des banderoles et des pancartes cela devenait clair, net et précis : «Il faut que vous dégagiez tous», suivi par d'autres slogans comme : «Le peuple exige que vous sautiez tous», «Nous voulons un formatage pas une mise à jour», «Des voleurs et vous vous dites nationalistes», «Non à la issaba», «Non à Bensalah et à Bedoui», «Qui jugera qui ?» Des slogans accompagnés d'autres aux relents locaux comme : «Vous avez bradé Tiaret et son foncier». Les marcheurs, hommes et femmes, souvent en famille, ont emprunté la rue Emir Abdelkader pour rejoindre la place par un long détour au carrefour Le Regina, alors que pour les habitants du sud de la ville, le point de convergence était l'esplanade du parc sportif Kaîd Ahmed. Amellal Fawzi Un millier de manifestants à Témouchent Comme le laissaient craindre les anomalies qui ont caractérisé la marche de vendredi 19 avril, les milliers de manifestants qui appelaient au départ du système se sont réduits hier à un millier de personnes tout au plus. Quant aux étudiants, fer de lance de la mobilisation, ils ont été les grands absents. Vendredi dernier, des gens ont quitté les rangs ayant remarqué la présence de leaders inconnus et la disparition de ceux qui les guidaient auparavant. Pis, les intempestives interventions de ces nouveaux venus pour guider les marches ont tout fait pour les faire échouer. Ce n'est d'ailleurs pas le trajet habituel qui a été emprunté, au point que les trois grandes marches partant respectivement du nord, du sud et du centre de la ville n'ont pu faire jonction en une imposante marche à travers la ville. Celle du centre s'est orientée vers la cour de justice pour réclamer l'implication des magistrats dans le dossier de la corruption. Cela s'est décidé sur un coup de fil reçu d'Alger par un organisateur. La marche du nord a refusé de la rejoindre parce que cela ne correspondait pas à ce qui avait été arrêté. Et quand les deux groupes se sont rencontrés, celle du centre ayant bifurqué après l'étape de la cour vers celle du nord, cette dernière a refusé de fusionner avec elle. Les marcheurs ont constaté de visu la manœuvre de sabotage, mais sans la comprendre comme telle, d'où le fait que les rangs se sont allégés. De la sorte, malgré le grand nombre de manifestants marchant en ordre dispersé, on pouvait croire à une décrue de la mobilisation. Cependant, outre la désorganisation criante, il y a les agissements de «leaders» qui ont fait naître la suspicion. D'aucuns ont remarqué au fil des semaines que des «dirigeants» se compromettaient publiquement avec des agents des RG. M. Kali Tlemcen : «Nous refusons ce régime !» Sans concession aucune, les Tlemcéniens, toujours aussi nombreux, réclamaient, hier, le départ de tous ceux qui représentent le régime scélérat, synonyme de pillage, de dilapidation de deniers publics et d'injustice. «Ni Salah, ni Bensalah, le régime chutera !» ; «Ô honte, gouvernement sans pouvoir de décision !» ; «Tlemcen en deuil !» ; «Houkouma de cocaïne» ; «Parlement peureux !», autant de slogans directs scandés en direction de dirigeants apparemment insensibles à un peuple exigeant un changement réel du régime. Le wali, symbole du régime prédateur, actuellement au centre de grands scandales liés au foncier, a été la cible d'une population, rassemblée en face du siège de la wilaya, criant sa colère : «Wali dégage ! Issaba Issaba !»Très au fait de ce qui se passe dans le pays, les manifestants exigent l'arrestation de Saïd Bouteflika, la tête de la mafia, et refusent les «mises en scène pour nous leurrer». Très disciplinés, et sans esprit folklorique, les protestataires citaient nommément les responsables de la situation catastrophique de l'Algérie, en commençant par Ouyahia qui devrait «être en prison». Tlemcen, longtemps brimée, n'abdiquera pas jusqu'à la chute de ce régime grabataire et de mafieux… C. Berriah