Dans une déclaration publiée quelques minutes après l'arrestation de Abdelouhab Fersaoui, l'association Raj a dénoncé l'attitude «condamnable et scandaleuse d'un régime autiste et aveugle», usant du harcèlement et de l'intimidation pour faire taire toute voix discordante. Abdelouhab Fersaoui, président du Rassemblement Actions Jeunesse (RAJ), a été interpellé, jeudi à Alger, par les services de sécurité, moins d'une semaine après la vaste rafle qui a touché des militants de son association. Fersaoui a été arrêté par des agents en civil à quelques mètres du tribunal Abane Ramdane (Sidi M'hamed), où il participait à un sit-in de soutien aux détenus. Dans une déclaration publiée quelques minutes après l'arrestation, l'association Raj a dénoncé l'attitude «condamnable et scandaleuse d'un régime autiste et aveugle», usant du harcèlement et de l'intimidation pour faire taire toute voix discordante. Braham Bennadji, député indépendant de la wilaya de Béjaïa, était aux côtés du militant dont il a essayé d'empêcher l'arrestation. «Juste avant la fin du sit-in, et au moment où Fersaoui accompagné de Saïd Salhi et deux autres militants s'étaient détachés du rassemblement, des individus en civil se sont jetés sans ménagement sur Fersaoui, visiblement déterminés à l'arrêter. Présent sur place, je me suis mis en devoir de le protéger afin de lui éviter des ennuis. Après un échange de mots, j'ai décliné ma qualité de député afin de faire entendre raison à ces individus. Ces derniers résolument décidés à embarquer le président du RAJ n'ont rien voulu entendre, m'intimant même l'ordre de m'en aller. J'ai dû insister en accompagnant à pied Fersaoui bien encadré par l'escouade de policiers en civil, du tribunal jusqu'au commissariat, décidé à aller jusqu'au bout pour mettre un terme à cette hogra digne des années de plomb», détaille-t-il. Jeune militant engagé, qui préside l'association agréée en 1993, Fersaoui a su rester discret. Il est apprécié de ses camarades et des acteurs de la société civile. «Fersaoui fait partie de la nouvelle génération de jeunes militants, qui incarnent toute cette force de la jeunesse qui a révélé de manière spectaculaire, le 22 février, toute son intelligence, son énergie et qui a permis l'espoir dans ce pays. En homme de dialogue, ouvert et constructif, il a su jouer le rôle de rassembleur, de médiateur dans la société civile et la classe politique éparpillées. Aujourd'hui, il est visé par le vieux monde pour ce qu'il incarne, la jeunesse, la conscience, l'espoir et l'Algérie nouvelle. C'est toute la société civile qui est visée en lui», relève Saïd Salhi, vice-président de la LADDH, présent au rassemblement devant le tribunal de Sidi M'hamed. «Positions dérangeantes» Les services de sécurité ont sévi ces derniers jours contre l'association RAJ. Sept militants du mouvement, dont Hakim Addad, un de ses membres fondateurs les plus en vue, ont été placés sous mandat de dépôt après leur arrestation, le 4 octobre, par des policiers en civil, à l'issue de la 33e manifestation hebdomadaire. Hakim Addad, Massinissa Aissous, Djalal Mokrani, Bouider Ahmed et Kamel Ould Ouali ont été présentés, dimanche dernier, devant le juge d'instruction, qui les a placés en détention provisoire pour «incitation à attroupement» et «atteinte à l'intégrité et l'unité du territoire». Dans une interview à El Watan au lendemain des arrestations «ciblées» contre les «EnRajés», Fersaoui précisait : «Le RAJ a choisi son camp qui est celui du peuple qui réclame le changement du système d'une manière solennelle depuis plus de 8 mois. Ce sont donc les positions, les actions et les initiatives du RAJ qui dérangent. Le pouvoir vise à casser et à affaiblir l'association et, à travers elle, toutes les dynamiques et les militants qui portent haut et fort les revendications du peuple sans prétendre le représenter, car le mouvement n'a pas besoin de représentants. Mais le pouvoir se trompe s'il croit affaiblir et casser le mouvement par la répression.» Fersaoui devra être présenté demain devant le procureur de la République de Sidi M'hamed. «Le délai de 48 heures de la garde à vue expirera demain (aujourd'hui). Il sera, comme c'est la règle, prolongé. Fersaoui, qui se savait menacé, sera présenté dimanche (demain). Il sera poursuivi pour les mêmes chefs d'inculpation que les autres militants», précise Me Fetta Sadat, députée RCD et avocate.