Samedi après-midi, le Premier ministre, Abdelaziz Djerad, a demandé aux Algériens de rester chez eux, d'éviter les attroupements et les lieux publics. Il a également demandé aux citoyens d'éviter les rassemblements dans les parcs, salles des fêtes et autres lieux similaires, ceci afin de se prémunir de tout risque de propagation du coronavirus. Après cette annonce, de nombreux citoyens dans la capitale se sont rués vers les superettes, de crainte d'une pénurie des produits alimentaires. A Chéraga, les grossistes ont été pris d'assaut par des citoyens qui se disent prévoyants. Abdallah, jeune père de deux enfants, déclare qu'il a commencé à se ravitailler en produits de première nécessité depuis quelques semaines déjà. «Je préfère avoir une longueur d'avance que de tomber en panne si toutefois le risque grimpe au stade 3 comme en Europe. J'ai deux enfants, une épouse et deux personnes âgées à nourrir et à soigner. De ce fait, j'ai décidé de ne prendre aucun risque sur le plan alimentaire et sanitaire», dit le jeune homme. En faisant un tour dans la capitale, on remarque que les supérettes sont bondées de monde. A Saïd Hamdine, non loin du la faculté de droit, une grande surface a fait le plein. Les habitants des alentours sont venus nombreux pour faire des réserves en produits de première importance. Paniers en main ou poussant des caddys, la frénésie a débuté pour bon nombre de familles au rayon pâtes et semoules. Les étals se vidaient à vue d'œil. Du jamais-vu. L'huile, le sucre, le sel, la farine et les produits d'hygiène sont partis à une vitesse jusque-là inégalée. Nous avons croisé des Chinois, des Espagnols et des Français dans les allées du magasin, tous n'avaient qu'une idée en tête, faire un maximum d'achats afin d'éviter tout risque de mouvement de panique ou de confinement, comme ce qui se passe en ce moment en Europe, considérée par l'OMS comme le foyer principal après la Chine. Chose également observée et qui était inconcevable c'était de voir des fourgons de livraison venir décharger d'importantes quantités de marchandises à des heures tardives. Un jeune homme signale par contre avec une pointe d'humour que «c'est une journée bénéfique pour le magasin». Le 15 mars est la Journée mondiale du consommateur. Dans le but de protéger ce dernier des risques d'arnaque en cette période où les prix de certains produits ont grimpé en flèche, l'Association algérienne de protection et d'orientation du consommateur et de son environnement (Apoce) dénonce certains dépassements, le plus flagrant étant l'augmentation du prix des gels hydro-alcooliques. Vendus en pharmacie ou en grande surface, leur prix n'excédait pas les 100 DA pour un flacon de 50 ml. Aujourd'hui, le prix a augmenté de 50 et parfois jusqu'à 100%, chose que les citoyens dénoncent ouvertement sur les réseaux sociaux. Mustapha Zebdi, président de l'Apoce, affirme que cette frénésie n'est pas anodine face à cette situation sanitaire très compliquée et qui paralyse le monde entier. «Nous avons constaté que la situation de panique et d'achat à grande échelle remonte déjà à 4 jours. Nous demandons aux citoyens de garder leur calme. Nous avons rencontré et contacté des personnes qui gèrent les points de ravitaillement en matières premières. Ces derniers nous ont informés que si la situation continue de cette manière, nous n'irons pas loin. Mais encore une fois, je rassure le citoyen et j'appelle ce dernier à garder son calme», informe-t-il. M. Zebdi revient également sur la disposition des produits de large consommation : «Nous disposons d'importantes réserves de blé, de farine, de lait et d'autres produits alimentaires dits de grande consommation. Mais je précise qui si nous continuons ainsi, cela va nous porter préjudice.» En ce qui concerne la spéculation sur certains produits pharmaceutiques, notre interlocuteur suggère l'intervention du ministère du Commerce. «Il faut que les prix des produits soient plafonnés et contrôlés par le département compétent afin d'éviter les fortes augmentations. La marge bénéficiaire est un outil de protection du consommateur», souligne M. Zebdi, tout en appelant les citoyens à ne pas verser dans la paranoïa et ne pas céder à la panique, car cette dernière causera plus de mal que de bien.