Dans un futur proche, notre pays entamera la phase de déconfinement et il serait primordial de s'appuyer sur les connaissances scientifiques cumulées depuis l'avènement de cette pandémie, pour pouvoir le réussir. En ci-peu de temps, plus de 18500 publications (sans inclure les prépublications ou les préimpressions) ont été éditées et le site LitCovid1publie la bibliographie la plus complète sur la pandémie ; transmission, diagnostic, traitement, prévisions, prévention.... Une recherche sur ce site, avec 3 mots clés : prévention, prévision et déconfinement, s'avère instructive pour soulever les défis futurs. La prévention : les stratégies de prévention, de contrôle, d'intervention et de gestion de la pandémie ont été analysées dans pas moins de 7800 publications et à lui seul le mot déconfinement en anglais «Containment exit» affiche 616 publications. La majorité des études reviennent sur les effets bénéfiques des mesures barrières en s'appuyant sur des observations précises tant le recul est suffisant avec des données plus fiables. Trois exemples pertinents à méditer : Hong Kong affiche 4 décès, les chercheurs ont confirmé qu'avec une surveillance numérique étroite, un confinement total et des mesures de distanciation sociales draconiennes, le pays a réussi à contenir rapidement la pandémie. L'Allemagne se distingue par sa stratégie de confinement total et rapide, couplée à un diagnostic massif, comparée à celles de ses voisines, a mieux résisté à la pandémie. A l'opposé, la stratégie choisie par les Etats Unis a eu des effets catastrophiques ; 1.8 millions de personnes infectées et plus de 108 000 décès. Toutes les études s'accordent sur les bienfaits des gestes barrières pour faire face à cette pandémie. Les Prévisions : Les données publiées récemment montrent deux faits cruciaux : primo, la science cerne mieux les mécanismes de diffusion du virus, secundo la pandémie semble s'essoufflée, certainement une conséquence de l'efficience des stratégies de lutte. Mais, les prévisions sur l'évolution de la situation avancées par les chercheurs, restent tributaires de plusieurs autres facteurs : L'immunité collective, la saisonnalité, la contagiosité et le nombre de tests de dépistage. L'immunité collective renvoie à la notion du taux de reproduction ou du R zéro (R0). Pour le Sars-Cov-2, le R0 serait aux alentours de 3, ce qui voudrait dire que l'immunité collective de la population ne sera atteinte, qu'une fois 2 personnes sur 3 soient infectées ou qu'elles soient vaccinées. L'analyse des données recueillies sur le cas Suédois, pays ayant choisi l'immunité collective est instructive, puisqu'elle n'a pas montrée de différences significatives en comparaison avec les données des pays ayant optés pour le confinement. Le pays, a connu la semaine dernière le taux de mortalité due au Covid-19 le plus important du monde avec 5,29 décès par million d'habitants. L'architecte de la stratégie suédoise l'épidémiologue Anders Tegnell a reconnu des erreurs d'appréciations des effets de la pandémie2. Donc l'immunité collective est un processus lent et à effets hétérogènes. La saisonnalité, les données scientifiques publiées apportent un éclairage instructif, les effets saisonniers sur les virus ne sont pas du fait des changements des conditions météorologiques, le virus est présent sous toutes les climats, mais, le changement des comportements des populations lors de la saison d'été et un indice UV élevé seraient deux facteurs susceptibles d'impacter la propagation du virus. Des études avancent un taux de propagation virale réduit à 40% et un R0 mondiale autour de 1,2, mais les auteurs insistent sur le maintien des gestes barrières pour tirer profit de ces conditions estivales. Contagiosité :des études montrent que le SRAS-CoV-2 est enclin à infecter des groupes de personnes étroitement liées et beaucoup de clusters sont constitués de peu de personnes ; environ 10% des cas conduisent à 80% de la propagation du virus, on parle alors de «superinfecteursou superspreaders». D'autres données expliquent que la diffusion du virus se fait majoritairement par aérosols; les cris peuvent libérer plus de virus que la parole et dans les endroits bruyants et clos ; usines, salles de sport, marchés couvets, le risque d'infection est presque 19 fois plus élevé qu'en plein air. Une personne qui a beaucoup de liens sociaux est susceptible de transmettre largement le virus ; si la transmission extra familiale par un cas index est de 6%, elle passe à plus de 17% dans le cercle proche. La personne la plus à risque est celle ayant eu un contact direct, en face-à-face, avec un cas index et quelle qu'en soit la durée ou avoir partagé avec elle un espace clos durant au moins 15 minutes. Les tests pour accompagner le déconfinement : Pour la communauté scientifique, les tests seront cruciaux pour accompagner le déconfinement, même si le processus est semé d'incohérences et de messages mitigés ; pour qui et pour combien de personnes, faut-il recourir à la RT-qPCR ou aux tests immunologiques ? Il est clair que les résultats des tests n'offrent pas les mêmes informations ; quelqu'un avec un test viral négatif, n'est pas contagieux ; si par contre il est testé négatif après un test immunologique, le résultat à un double sens : soit la personne n'a jamais été exposée au coronavirus ou le seuil de sa réponse immunitaire est bas pour être détecter par le procédé, dans ce cas, il ne faut pas exclure l'éventualité que cette personne soit contagieuse. Enfin, une recherche sur le site par mot clé « Algeria », fait apparaitre un article du 07 mai 20203, relatant la situation nationale ; étude SEIR (Susceptible, Exposed, Infectious and Recovered) se basant sur des données sanitaires communiquées le 3 avril 2020. Les auteurs de cette étude prédisaient la fin de la pandémie en Algérie au 30 mai 2020, néanmoins, ils avaient insisté sur le fait que cette prévision est conditionnée par le respect strict des mesures barrières et de la distanciation sociale. Il est évident que cette profusion de publications n'échappe pas aux biais des particularités des situations et des logiques souvent contradictoires poursuivies dans la gestion mondiale de la pandémie. A ces logiques s'ajoutent les disparités des moyens de lutte et des approches méthodologiques ; il arrive parfois au sein même d'une discipline scientifique, que les points de vus ne soient pas unanimes entre les épidémiologistes, les infectiologues, les biologistes, les médecins et les mathématiciens. Mais toutes ces études s'accordent sur un fait majeur ; la maîtrise du déconfinement passera essentiellement par l'instauration par les états de facteurs d'intervention puissants: le port systématique de masques avec les gestes barrières habituels et le recours au dépistage, plus tôt ils seront déployés, plus tôt la pandémie sera contenue. Par Dr Mustapha Bensaâda Maître de conférences classe B, université de Khenchela Abbès Laghrour