Le mouvement de l'opposition s'est mobilisé encore une fois par une manifestation dans la capitale bélarusse contre le président Alexandre Loukachenko, qui a prêté serment de manière inattendue cette semaine, en dépit d'un mouvement de contestation sans précédent depuis des semaines, rapportent des médias. Le président Loukachenko est confronté depuis la présidentielle du 9 août à une contestation inédite, des dizaines de milliers de personnes sortant dans la rue chaque dimanche à Minsk pour dénoncer sa réélection jugée frauduleuse, et cela malgré la répression du mouvement. Dans le centre de Minsk, plusieurs stations de métro ont été fermées en prévision de la marche et le Palais de l'Indépendance, où siège A. Loukachenko et où des rassemblements massifs ont convergé dernièrement, était hérissé de barrières et lourdement gardé par la police antiémeute. «Nous sommes des millions», a affirmé la rivale du chef de l'Etat, Svetlana Tikhanovskaïa, dans un message publié hier sur les réseaux sociaux pour soutenir les manifestants, «nous allons gagner». Dès samedi, les autorités ont procédé à quelque 150 arrestations, essentiellement de femmes rassemblées pour protester contre le régime présidentiel, ainsi que de journalistes. Réfugiée en Lituanie, Svetlana Tikhanovskaïa revendique la victoire lors de l'élection, après une campagne électorale durant laquelle cette novice en politique a galvanisé les foules. Investiture «en catimini» Alexandre Loukachenko a pour sa part prêté serment mercredi pour un sixième mandat, provoquant de nouvelles manifestations le jour même. La cérémonie au palais présidentiel n'a pas été annoncée et s'est déroulée en catimini. «Cette prétendue investiture est évidemment une farce», a dénoncé Svetlana Tikhanovskaïa. Le gouvernement allemand a jugé que «le secret» entourant la cérémonie d'investiture était «révélateur» des faiblesses du régime et que, faute de «légitimité démocratique», Berlin ne reconnaissait pas la réélection de Loukachenko. Le président français, Emmanuel Macron, doit effectuer de son côté, à partir d'aujourd'hui, sa première visite en Lituanie et en Lettonie, deux Etats baltes qui espèrent son appui face à la crise politique au Belarus voisin et aux pressions russes. L'Union européenne (UE) a indiqué ne pas reconnaître la légitimité de Loukachenko, tout comme l'Allemagne et les Etats-Unis. «Ce qui se passe en Biélorussie, c'est une crise de pouvoir, un pouvoir autoritaire qui n'arrive pas à accepter la logique de la démocratie et qui s'accroche par la force. Il est clair que Loukachenko doit partir», a déclaré pour sa part le président français hier dans un entretien au Journal du dimanche (JDD). Alexandre Loukachenko, qui accuse les Occidentaux d'avoir fomenté la protestation, a promis une vague réforme constitutionnelle pour répondre à cette crise politique, mais il a exclu tout dialogue avec les détracteurs du régime qu'il pilote depuis 1994. Il a demandé l'aide de son homologue russe, Vladimir Poutine, qui a promis un soutien sécuritaire à Minsk si nécessaire et un prêt de 1,5 milliard de dollars au Bélarus. Le régime bélarusse a emprisonné de nombreux cadres du Conseil de coordination de l'opposition créé par Mme Tikhanovskaïa. D'autres ont dû fuir leur pays. Maria Kolesnikova, l'un de ses alliés de premier plan, est emprisonnée et accusée d'avoir porté atteinte à la sécurité nationale.