Survenant quelques semaines seulement après la rupture des relations diplomatiques entre Alger et Rabat, la brouille politique opposant l'Algérie à la France, provoquée par les propos révisionnistes sur les fondements historiques de la nation algérienne tenus par le président français, Emmanuel Macron, et rapportés par le quotidien Le Monde, aurait, en d'autres temps, ravivé, dans un élan de mobilisation populaire spontanée, l'union sacrée des Algériens, classe politique et société civile réunies, autour de leurs institutions pour dénoncer les agressions extérieures sous toutes leurs formes dirigées contre le pays. Fondamentalement, il ne s'en trouvera pas un seul Algérien fier de son algérianité, imprégné des valeurs de Novembre, jaloux de l'indépendance du pays pour concéder, pour quelque raison que ce soit, un quelconque marchandage de la souveraineté du pays chèrement acquise. Dans un passé pas très lointain, la moindre provocation ciblant l'Algérie donnait lieu à un sursaut nationaliste et patriotique collectif, pour défendre le pays contre toute velléité, d'où qu'elle vienne, d'attenter à sa souveraineté. Force est de constater depuis ces dernières décennies et aujourd'hui encore, comme le démontre l'actualité, que le front intérieur qui avait fait la démonstration éclatante de son unité et de sa résilience, face à des événements majeurs qui ont marqué l'histoire contemporaine de l'Algérie : sur les dossiers du Moyen-Orient et de la question palestinienne, du Sahara occidental, lors du choc pétrolier des années 1970, s'est littéralement liquéfié. Les réactions, timides, limitées aux institutions et à des partis politiques proches du pouvoir suscitées par la banderille plantée par le président français dans le corpus de la formation de la nation algérienne et sa Révolution, renseignent sur la profondeur de la fracture politique et sociale qui traverse la société algérienne, conséquence évidente de la délégitimation des institutions en place. Il y a comme un réflexe inhibitoire des Algériens, un malaise profond, particulièrement chez tous ceux qui aspirent au changement du système et de la gouvernance du pays, porté par le mouvement populaire du 22 Février non abouti, à se faire ouvertement l'écho et à endosser les positions officielles du pays . Y compris sur des questions stratégiques, même si, au demeurant, l'opinion y adhère totalement. Sans le soutien populaire franc et massif, la voix officielle, aussi prégnante soit-elle, n'aura aucune portée politique pour peser sur le cours des événements, affirmer son autorité et sa souveraineté à l'international. Le président français s'est allégrement engouffré dans cette brèche en distinguant la société algérienne «dans ses profondeurs», pour laquelle il affirme nourrir de bons sentiments, et le régime en place désormais catalogué parmi les systèmes politiques peu fréquentables. Il est admis que l'appréciation extérieure distribuant les bons et les mauvais points aux Etats en développement et à leur gouvernance n'est jamais neutre. Mais c'est parce que l'effort d'introspection n'a pas été fait de manière objective et avec le courage politique requis, dans tous les domaines de la vie nationale, ou fait de manière tronquée, avec calcul, en préconisant de fausses solutions aux vrais problèmes de développement, d'édification de l'Etat de droit et de démocratisation du pays, que l'Algérie se trouve fragilisée et son image écornée. Advertisements