Les conférences de presse données par l'Egyptien Ahmed Saïd et Hocine Chafii, vice-président sous Nasser, hier à la salle Dounyazad, et l'entretien exclusif qui nous a été accordé à El Izza de Maghnia, par Houda, la fille de Djamel Abdenasser, ont remué la mémoire poussiéreuse des Arabes. Empreint d'un nationalisme, qui peut paraître désuet, à la limite du ridicule, Ahmed Saïd, qui a d'abord retracé les premières heures de la Révolution algérienne (un véritable témoignage) à partir du Caire et d'Alexandrie, s'est interrogé amèrement : « pourquoi les Arabes étaient-ils unis sous l'occupation ? Que s'est-il vraiment passé durant les cinquante dernières années ? Pendant l'époque de Nasser et de Ben Bella, nous étions tous mobilisés pour les mêmes causes arabes. Il y avait un monde arabe, pas des pays arabes. Aujourd'hui, il y a une révolution en Irak. Curieusement, aucun des Arabes ne semble s'en offusquer. Est-ce que la génération post-Nasser a trahi ? Faut-il déclencher une deuxième révolution algérienne ? Moi je dis que nous avons toujours besoin de héros comme Nasser et Ben Bella. » L'auditoire adapté aux circonstances de l'heure (présence d'anciens révolutionnaires du monde arabe et d'Amérique latine), applaudit. L'émotion y était aussi. Jusqu'aux larmes. Les plus jeunes, qui ne connaissent ni Nasser ni Ben Bella, tentent de suivre les discours. Avec respect. Hocine Chafii, vice-président de l'époque de Nasser, auquel la sénilité n'a rien entamé de son verbe et de ses convictions nationalistes, mais surtout religieuses, prône une réunification autour de l'islam pour rebâtir un monde islamique fort. Thèse que ne semble pas partager la fille du symbole Nasser, Houda, toujours élégante, malgré ses 53 ans. « Il est vrai que le nationalisme est toujours une réalité, même s'il n'y a plus d'unité politique. Par ailleurs, je ne suis pas tout à fait d'accord avec le discours religieux de Chafii, parce que, de mon point de vue, il n'y a pas de contradiction entre l'arabisme et l'islam. Non, je n'ai pas la même appréciation de la situation dans le monde arabe que mon compatriote Chafii. » Dans un autre contexte, Mme Houda dira de la scène politique de son pays que « l'Egypte d'aujourd'hui n'est pas très impliquée politiquement. Le peuple est apathique. Mais, j'ai l'espoir d'un réel changement ». Par ailleurs, Ben Bella souhaite-t-il profiter de cet hommage grandiose qui lui a été rendu par la population de Maghnia, par plusieurs invités du territoire national et l'étranger pour concrétiser le projet de la réconciliation nationale ? On parle d'un comité en ce sens qui naîtra dans cette ville frontalière. C'est quasiment indubitable, surtout lorsqu'on sait que lors de son discours d'ouverture, l'ancien Président a dédié ce jubilé au « président de la République et à la réconciliation nationale ». Même pendant le gala organisé à la salle omnisports de Maghnia, animé par Blaoui Houari, Mohamed Lamari, Hadj Ghafour et Hamdi Benani, si Ahmed, fortement applaudi, a pointé un doigt en direction du portrait géant de Bouteflika, histoire de leur demander d'applaudir le président de la République, plutôt. Attendons le discours de clôture pour en savoir plus peut-être..