A l'approche des grandes chaleurs, une véritable passion s'est emparée des jeunes : la pêche à la ligne. Pêcher la carpe est devenu en ce début d'été le passe-temps favori de ces jeunes, de 6 à 35 ans. Munis de leurs cannes, de leurs seaux et d'appâts, ils n'hésitent pas à faire deux ou trois fois le déplacement au barrage de Oued Lakhal. Ils viennent de partout : de Bouira, de Sour El Ghozlane, de Aïn Bessem et même de Lakhdaria. Ils en arrivent aussi des petites localités voisines comme El Hachimia, Bir Ghebalou, Khabouzia, Aïn Laloui, Aïn El Hadjar... C'est généralement vers 16 h 30 que s'organise la partie de pêche qui ne s'achève que vers 20 h. L'endroit est féerique non seulement à cause de l'immense étendue glauque qu'une légère brise hérisse de milliers de vaguelettes, mais à cause aussi de ce joli bois de pins tout bruissant de chants d'oiseaux. Le long du rivage aux dessins si beaux, des dizaines de pêcheurs sont installés avec leurs lignes. Certaines sont dotées de deux hameçons. L'abondance de poissons est telle que celles-ci se relèvent toutes les cinq minutes environ et l'on voit alors luire dans l'air prodigieusement clair et doux une belle pièce argentée. Ahcène et son ami Omar venus de Lakhdaria ont leurs paniers moitié pleins. Ils étaient là depuis le début de l'après-midi. Cependant, pour eux, le plaisir de pêcher l'emporte sur celui que procure une belle prise. Mahfoud, un fonctionnaire qui vient ici deux fois par semaine, n'a qu'un but : passer le temps et permettre à ses deux enfants (7 et 9 ans) de changer d'air. Ceux-ci sont heureux de sortir avec leur père, même si le barrage est loin d'égaler la mer qu'ils aiment. Venant de Aïn Bessem, Nacer, un jeune commerçant, et Ali, un jeune stagiaire, avouent ne pratiquer la pêche que pour le plaisir. Cela ne les a pas empêché de faire une belle prise. Le premier, qui a 21 ans, ajoute en regardant l'eau claire que certains jeunes n'hésitent pas à piquer un plongeon, à condition de ne pas aller loin, car si l'eau n'est pas profonde en certains endroits et le fond ferme, il n'en est pas de même dans d'autres coins du milieu du barrage où l'eau est traîtresse à cause de la vase qu'elle dissimule. Un peu plus loin se tiennent Ali et Chabane (30 et 35 ans). Tous deux viennent d'arriver. Ils ont pris 15 et 20 poissons respectivement. Pour leur rêve : attraper une carpe d'un kilo et plus. Jusqu'ici, ils se sont contentés de pièces ne dépassant pas la livre. Dédaigneux du menu fretin dont beaucoup de pêcheurs se contentent, Djamel, assis sur une petite chaise en plastique, remet à l'eau deux petits poissons qu'ils venait de prendre. « Dans un an, elles (les carpes) pèseront entre 5 et 6 kg. J'espère être là pour les prendre au bout de ma canne à pêche. » Il a 24 ans et il affirme que la pêche à la ligne tient lieu pour lui d'une grande et vraie passion. Une passion partagée par des dizaines d'habitants des localités où passe l'oued Lakhal. Avec la pluviométrie enregistrée ces trois dernières années, l'oued Lakhal ne tarit plus et offre une opportunité unique aux amateurs de la pêche à la ligne pour taquiner la carpe. On en voit ces jours-ci par dizaines le long des berges aux végétations toujours vertes et touffues. Quelques-uns de ces amateurs demeurent accrochés à leurs lignes jusqu'à 22 h 30. La pêche change alors d'objet Ce n'est plus la carpe qui est ciblée dès que l'astre de feu plonge à l'horizon, mais l'anguille dont la grosseur peut atteindre celle d'un bras d'homme, à en croire Boussabaâ, un de ces riverains pêcheurs.