Avec une carrière jalonnée de succès commerciaux (son dernier film War of the worlds, la guerre des mondes, adapté de H. G. Welles, est au top du box-office), le cinéaste américain Steven Spielberg a entrepris, cette semaine, le tournage, sur l'île de Malte, d'une nouvelle production. Basé sur un scénario écrit par le dramaturge Tony Kushner, le film que tourne Spielberg n'a même pas encore de titre, mais Universal Pictures a déjà prévu sa sortie pour le 23 décembre prochain, juste pour la saison du choix pour les oscars 2006... En fait, Spielberg a fait un peu de résistance avant de se lancer dans cette nouvelle aventure. Le scénario-choc, qu'il avait sous les yeux et qu'il a montré à Bill Clinton, Dennis Ross et à beaucoup de ses amis qui ont travaillé à la Maison-Blanche et au département d'Etat en contact avec les affaires du Proche-Orient, traite des assassinats de militants palestiniens par des agents du Mossad dans la période qui a suivi les attaques de septembre noir contre les athlètes israéliens aux Jeux olympiques de 1972 à Munich. Selon The New York Times, Spielberg a été jusqu'à envoyer des messages afin d'expliquer ce qu'il veut faire avec son thriller politique à la rédaction du quotidien (NYT), au quotidien israélien Meariv et à la chaîne de télévision El Arabia. Spielberg trouve, selon The New York Times, son sujet « très délicat, semé de mines », alors que le scénario est inspiré de l'ordre donné par Golda Meïr au Mossad d'éliminer le plus de Palestiniens possible pour venger les morts israéliens à Munich. Il se trouve que Spielberg a toujours été un partisan acharné des thèses israéliennes, nul ne peut le soupçonner de vouloir défendre la juste lutte du peuple palestinien. Son film, Schindler's List, en 1993, sur l'holocauste, a eu, par ailleurs, un succès international. En sollicitant les conseils de Bill Clinton et de trois médias différents (américain, israélien et arabe), Spielberg voudrait sans doute qu'on ne le crut pas en train de filmer une histoire qui pourrait soulever des critiques, surtout en fait de la part des Israéliens. Pourquoi vouloir filmer cette histoire ? Pour la bonne raison que les exécutions sommaires de Palestiniens par des agents du Mossad sont des faits authentiques, et que cela se passe encore aujourd'hui avec les assassinats ciblés. La thèse de Spielberg et de son scénariste, au regard de la sécheresse et de l'horreur des faits (qui ne soulèvent toujours aucune critique de Washington), est de faire croire que parmi les assassins du Mossad, il se trouvait des types qui doutaient parfois de l'objet de leur mission et qui se posaient des problèmes de conscience. Des tueurs « humains » en quelque sorte.