La loi n'a pas d'effet rétroactif. Le dossier reste ouvert. » C'est la réponse qui résonne comme un aveu d'impuissance du ministre de l'Habitat, M. Hamimid, au dossier épineux des constructions illicites édifiées avant l'entrée en application de la loi d'août 2005 qui réprime sévèrement les auto-constructeurs peu scrupuleux des textes et lois sur l'urbanisme. Seules les bâtisses non conformes construites après cette date sont touchées par les décisions de démolition, a précisé le ministre, qui a révélé que plus d'un millier de constructions anarchiques recensées sur le territoire national ont été livrées au bulldozer. Que représente cette « moisson » devant l'ampleur du phénomène ? Tout laisse à penser - à bien décoder le message du ministre de l'Intérieur qui s'abrite derrière un juridisme rigoriste - que les pouvoirs publics s'apprêtent à décréter une amnistie urbanistique pour les milliers (millions ?) de constructions illicites antérieures à la loi de 2005. C'est en effet le sens à donner à la déclaration du ministre. La faisabilité politique d'une option de démolition globale de toutes les constructions illicites est en effet difficile à envisager dans un contexte politique aussi fragile où la paix sociale tient à peu de choses. Une telle situation générerait plus de problèmes qu'elle n'en résoudrait. L'Etat a-t-il les moyens d'une politique coup-de-poing ignorant les coûteuses retombées sociales avec ces milliers de familles qui vont se retrouver sans toit et sans aucune perspective d'être relogées dans le court et moyen termes compte tenu du déficit du parc immobilier ? Entre la nécessité de restaurer l'autorité de l'Etat complètement écornée sous l'effet de l'instabilité dans laquelle a été plongé le pays au cours de la décennie écoulée marquée par le règne de l'anarchie et le souci de préserver la paix sociale, déjà très précaire, il faudra trouver un point d'équilibre qui concilie les intérêts de l'Etat et de la collectivité nationale avec ceux des citoyens. Le tout dans un climat de sérénité où le citoyen n'aurait pas le sentiment de vivre dans un pays fonctionnant avec une justice à deux vitesses : on détruit pour certains et on régularise pour d'autres, coupables pourtant - les uns et les autres - de la même infraction.