Alors que l'on tablait sur un retour à la normale après le départ du contesté Ali Benflis, après la raclée électorale de la présidentielle du 8 avril dernier, le FLN replonge dans un nouvel épisode de crise qui semble brouiller les cartes des partisans de la réunification. Après le feuilleton inédit, qui a assombri l'histoire pluraliste de l'Algérie, les déchirements regagnent les rangs de l'ex-parti unique. Le feuilleton se poursuit. Il semble être alimenté par une sorte de « haine » que cultivent certains membres « engagés » dans le mouvement de redressement vis-à-vis des partisans de Benflis. La présence de quelques têtes, une vingtaine, au sein de la commission nationale de la préparation du 8e congrès « rassembleur », installée fin juillet dernier par le coordinateur national, Abdelaziz Belkhadem, a soulevé un vent de colère au sein des « irréductibles ». Sans tarder, Amar Tou, partisan de cette aile et également ministre des Télécommunications, chef de file, monte au créneau et charrie avec lui nombre de cadres et militants. Ceux-ci contestent la composante de la commission arguant que « certains noms qui sont responsables de la déviation du parti et de l'éparpillement de sa base » y figurent. L'argument du groupe de Tou est que « la réunification ne veut à aucun moment dire, avoir confié l'organisation de ce congrès à ceux qui étaient à l'origine de son échec ». dialogue Tayeb Yenoun, porte-parole des coordinations de wilayas, persiste et signe : « Si un dialogue franc n'est pas engagé pour résoudre ce conflit, nous ferons porter l'entière responsabilité de ce qui en découlera à Belkhadem. » Menace ou mise en garde ? « Il n'est pas question de confier des postes de responsabilité à des félons. C'est intolérable », ajoute-t-il. Ainsi, Tayeb Yenoun précise que « Belkhadem n'est pas la source du conflit. S'il veut respecter la volonté de la base nous sommes avec lui, mais dans le cas contraire nous réagirons fort ». Selon lui, une commission composée de sept membres a été mise sur pied jeudi dernier. Elle a pour mission de prendre attache avec l'ensemble des membres du bureau national dans la perspective de règler cette crise. Crise qui, d'après M. Yenoun, ne trouvera pas son épilogue si certaines personnes sont maintenues dans la commission chargée de l'organisation du congrès. Faute de quoi l'aile inflexible passera, de son côté, à l'installation d'une commission parallèle à celle de Belkhadem pour tenir son « propre congrès ». Pour ce faire, les acteurs de cette aile ont annoncé dans la déclaration sanctionnant la réunion d'Oran, jeudi dernier, la tenue prochaine d'une réunion à Tizi Ouzou. Une réunion qui n'aura lieu qu'en cas d'échec du dialogue entre les deux parties. Dans ce cas là, c'est le divorce entre Belkhadem et Tou. Mais la position de Si Affif, membre de la commission nationale et bras droit de Belkhadem, est étonnante, d'autant plus qu'il était parmi les éradicateurs du mouvement qui refusaient de traiter avec les pro-Benflis. crainte Contacté, Si Affif déclare, depuis Bruxelles, qu'il partage la « crainte » des partisans de Amar Tou, en écartant pour autant l'existence d'un quelconque conflit entre ce dernier et Belkhadem. Pour étayer ses propos, Si Affif affirme que la déclaration faite à partir d'Oran a été mal interprétée. Car, selon lui, les rédacteurs de cette déclaration voulaient seulement protéger le parti d'une « nouvelle déviation » qui pourrait être engendrée par les pro-Benflis qui figurent dans la commission du congrès. « On n'a à aucun moment évoqué un quelconque conflit avec le coordinateur national », a-t-il attesté, avant de rejoindre les contestataires dans leur position d'un point de vue de principe. « guerre de leadership » Pour lui, ce que demandent ces militants à Belkhadem c'est de ne pas laisser « ceux qui ont provoqué la fitna, outragé les institutions de l'Etat, porté atteinte à l'emblème national et insulté le président de la République », de prendre les devants du parti. Loin de ces déclarations, la réalité du terrain renseigne sur l'exacerbation de la crise au sein de cette formation. Certains observateurs iront jusqu'à l'interpréter comme une sorte de « guerre de leadership » entre Tou et Belkhadem. Selon ces observateurs, M. Tou ne semble pas content de jouer un rôle secondaire et vise même une place de haut niveau. C'est ainsi qu'il fait un « pressing » sur son rival. Le meilleur moyen ne pourrait être que celui de lui créer une dissidence. Et ainsi, Belkhadem, qui s'est vu les premiers temps dans la peau d'un nouveau secrétaire du FLN, risque de perdre le contrôle du parti. Se voulant un réunificateur, ou plutôt un point de médiation entre le mouvement de redressement et ce qui reste des pro-Benflis, Belkhadem est mis à mal par cette vague de contestation.