Ils sont des dizaines de milliers à avoir franchi la frontière entre la bande de Ghaza et l'Egypte, depuis le départ des forces israéliennes qui contrôlaient le secteur depuis 38 ans, date de l'occupation de la bande de Ghaza en 1967. Cette frontière située au sud de la bande de Ghaza, longue de près de 13 kilomètres, connue sous le nom de couloir de Salaheddine pour les Egyptiens et les Palestiniens, couloir de Philadelphie pour les Israéliens, était l'un des endroits les plus gardés du temps de l'occupation. Le terminal de Rafah, dont le contrôle reste à ce jour l'un des plus importants points de discorde entre Palestiniens et Israéliens est sur cette ligne de frontière. Ce point de passage représente la seule ouverture vers le monde extérieur pour les habitants de Ghaza. Sa fermeture signifie la mise en prison effective de plus de 1,3 million de citoyens. Face à la décision israélienne de fermer ce terminal pour une durée de 6 mois, les citoyens palestiniens avides de liberté n'ont trouvé d'autre alternative que de se ruer par milliers sur cette ligne de frontière, pour passer en Egypte, soit en escaladant des murs ou en passant par des brèches qu'ils ont occasionées dans le mur barbelé. Les 750 gardes-frontières égyptiens installés dans le secteur à la suite de l'accord égypto-israelien ont été submergés par le flot humain. Beaucoup de retrouvailles familiales. Des personnes interdites pendant des années de se rendre dans les territoires palestiniens ont pu finalement se rendre chez eux. Khaled, dont la mère vivait à Cheikh Zouaied près de la ville égyptienne d'Al Aariche nous a dit : « Ma mère est une vieille femme qui ne pouvait pas se rendre dans la bande de Ghaza faute de laissez-passer. Israël n'en n'a pas délivré durant les 5 dernières années. Cela a été une véritable aubaine. Je l'ai ramenée chez moi. Vous ne pouvez pas imaginer sa joie ainsi que celle de mes enfants dont certains ne l'ont jamais vue ». D'autres personnes, qui n'ont jamais quitté la bande de Ghaza, étaient poussés par la curiosité de voir l'Egypte voisine. Malgré le renforcement des forces égyptiennes et palestiniennes, la frontière continuait jeudi à être perméable, des centaines de personnes passaient encore de part et d'autre. Les autorités locales égyptiennes de Rafah avaient appelé mercredi les Palestiniens entrés illégalement en Egypte à regagner la bande de Ghaza, la frontière étant officiellement fermée depuis mardi à minuit (21h GMT). Craignant l'infiltration d'éléments liés au groupe d'Al Qaîda dans la bande de Ghaza, Rafiq Husseini, un des conseillers du président Mahmoud Abbas a déclaré : « Nous sommes plus inquiets qu'Israël à propos d'Al Qaîda, parce qu'Al Qaîda nous fera encore plus de mal qu'à Israël ». Une telle présence mettrait à mal les perspectives de paix et de reprise des négociations avec Israël. « L'appareil sécuritaire de l'Autorité palestinienne arrêtera tout membre présumé d'Al Qaîda ou d'autres groupes terroristes s'ils infiltrent Ghaza », a-t-il poursuivi. La solution à cette anarchie qui règne du côté de la ligne de frontière reste l'ouverture officielle du terminal de Rafah sous contrôle égypto-palestinien, qui permettra aux citoyens de sortir sans contraintes vers le monde extérieur, mais aussi de sauvegarder l'économie locale. En attendant, les forces de l'ordre des deux côtes doivent montrer un peu plus de fermeté.