Réalisateur, metteur en scène et scénariste, Ali Mouzaoui explore à présent le monde de la littérature. Thirga au bout du monde est le titre d'une bouleversante œuvre de fiction parue dernièrement en France chez l'Harmattan. L'imagination fertile et la culture immense de l'auteur ont donné forme à un roman qui n'est point un récit linéaire d'une simple histoire. C'est surtout une mise en scène de personnages psychologiquement instables qui évoluent dans un village, Thirga (rêve), théâtre d'événements qui ont marqué l'histoire du pays, dans sa partie kabyle. L'arrivée des Turcs dans la vallée du Sébaou, la conquête française et la guerre d'Algérie sont vécues de manière terrible. La résistance est quotidienne. A Thirga, les hommes sont durs, les femmes aussi. Celles-ci, rugueuses mais soumises, jouent néanmoins un rôle prépondérant dans la vie villageoise. Les questions d'honneur, la condition de la femme, l'adultère, le meurtre sont autant d'ingrédients qui mettent le lecteur mal à l'aise et qui rendent enfin le roman vivant. Style simple, sens du détail aiguisé et scènes marquantes, Ali Mouzaoui, tel un caméraman, réalise de gros plans, fait des zooms et fouine dans les moindres recoins de la mémoire de la psychologie pour fixer un réel. Une forme de provocation qui remet en cause le mode de vie des anciens, le nôtre également. Parlant de littérature, Ali Mouzaoui dira : « Dans mon travail, il y a de l'imaginaire. Je ne suis pas chroniqueur. J'écris de petites histoires, mais le dire avec des films revient cher et dur. Avec le stylo, c'est plus facile. » Thirga est réalité. Il coûte 16 euros. Le rêve de Ali Mouzaoui d'une carrière littérature prolifique est bien réel. Un deuxième roman est à 70% achevé, nous a-t-il confié. Mais encore faudra-t-il que ses romans rencontrent le lecteur.