Plusieurs Souk El Fellah et Galeries ont fermé leurs portes lors de la décennie noire. Les événements d'octobre 1988 ont sonné le glas des Galeries et autres Souk El Fellah de l'époque de l'Infitah, mais, des années plus tard, la situation est tout aussi misérable. Les Galeries et autres Aswak, dissous en 1997, ont disparu, cédés à des banques ou à des opérateurs privés qui se sont lancés dans la grande distribution. Les anciennes Galeries du Ruisseau, à Belouizdad, sont devenues un lieu malfamé : des jeunes s'y installent sans qu'ils soient aucunement inquiétés. «Des jeunes, étrangers à la cité, disposeraient chacun de cadenas et de chaînes, et le soir, c'est la ruée vers cet endroit. Les autorités locales, qui ont entamé des semblants de travaux suite à une pétition des riverains, ne sont pas décidées à reprendre en main les Galeries et les riverains souffrent toujours de cette situation. Même la présence d'un commissariat de police sur l'autre trottoir n'y change rien», se désole un jeune du quartier, en compagnie de ses amis en face de ces locaux dégradés, aux murs décrépis et d'où se dégage une odeur de renfermé. Le décor de cette partie de l'ex-Belcourt en est affecté : l'immeuble imposant dans lequel ont été installés les stands de l'ancienne Galerie est comme une plaie. La situation n'est pas pareille que celle des autres Monoprix et Souk El Fellah répartis dans plusieurs quartiers d'Alger. A la rue Belouizdad, l'ancien Monoprix a changé de vocation : saccagé lors des événements d'octobre, il sera «cédé» quelques années plus tard à la Banque extérieure d'Algérie (BEA) qui y a aménagé une agence. Les travaux de construction de l'agence, confiés à un entrepreneur privé, ont été achevés mais l'agence reste fermée. Un riverain s'étonne qu'on puisse réaliser d'une telle structure dans un «quartier malfamé. Le marché aux puces de Laâqiba est juste à quelques mètres. Comment peut-on décider sans trop réfléchir d'installer une telle structure dans cet endroit ?» Le privé national s'y implique… «Il est nécessaire de délocaliser l'arrêt en face de la banque, sinon le trottoir qui s'est rétréci ne peut pas contenir tous les piétons», signalera encore le riverain. L'endroit a connu son pourtant «heure de gloire» durant les années 1980. «Moi, j'habitais plus haut que la salle Harcha et j'avais deux endroits où faire mon marché. Soit je partais au monoprix de Belcourt, soit à celui du Champ de manœuvres (actuelle place du 1er Mai), transformé en siège de la Casoral (CNAS). J'y trouvais de tout et à des prix abordables ; toute cette frénésie consumériste a pris fin avec les éventements d'octobre. Je revois toujours ces émeutiers qui faisaient des provisions de viandes dans ces galeries, en dizaines de kilos, avant de remonter vers Cervantes ou le boulevard des Martyrs où se trouvait un espace de vente aussi important», se rappelle Mustapha, la cinquantaine bien entamée. Même situation des Galeries de Didouche, acquises par la même banque, mais là aussi l'ouverture est reportée sine die. La raison en serait, selon des témoignages de riverains, un litige opposant la banque à un entrepreneur qui réclame des droits sur l'espace abandonnés par des travailleurs qui ont géré, un temps, les Souk El Fellah et les Galeries. Reste que la situation des espaces de vente de la rue Larbi Ben M'hidi (ex-rue d'Isly) est symptomatique du passage sans transition de du «socialisme spécifique» à une économie de marché qui peine à s'installer. «Le Bon Marché de la rue d'Isly a fermé, les Galeries algériennes, sublime œuvre architecturale néo-mauresque de Petit ont fermé aussi, avant d'être repris par le ministère de la Culture qui y a installé un musée d'art moderne. On ne sait pas comment pensent nos responsables, on transforme des Galeries en musées, sans grande réflexion», se désole un habitants de l'avenue Pasteur. La situation des Galeries et autres Souk El Fellah est partout pareille, à Ben Aknoun, El Biar, Hussein Dey, El Harrach, Garidi II : repris par des travailleurs avant d'être cédés à des privés, ces espaces de vente fermeront vite quelques années après l'installation des heureux acquéreurs. Khalifa a essayé, comme nous l'ont confirmé des sources locales, de faire main basse sur un espace de la rue d'Isly, peine perdue. Blanky a vite fermé ses structures. Son projet Promy a été compromis par des lourdeurs administratives. Un espace a même été cédé à l'APC qui y a installé ses bureaux d'état civil. Les espaces de grande distribution changent de main et de vocation au gré des intérêts des acquéreurs. L'ouverture d'autres espaces comme le centre commercial de Bab Ezzouar fera-t-il oublier l'expérience ratée de Carrefour ?