Durant le Ramadhan qui vient de s'achever, l'action de solidarité envers les populations pauvres et déshéritées a fait presque défaut suscitant beaucoup de commentaires. A Bou Ismaïl, le centre du Croissant-Rouge algérien, qui habituellement soulage des milliers de familles, a été fermé. Il semble, selon nos interlocuteurs, après plusieurs années d'activité, qu'en 2005, cette infrastructure a été jugée non conforme par une commission de wilaya. Lors de notre visite à ce centre, c'est la tristesse qui se dégageait des lieux ; car nombreux étaient les hommes et les femmes qui se rendaient volontairement dans ce centre pour travailler dans les cuisines et servir les repas aux centaines de familles démunies qui venaient de partout. Après celui de Hadjout, nous nous sommes rendus au centre CRA de Cherchell. Le responsable local n'avait pas l'air de se plaindre. Les bienfaiteurs anonymes se sont manifestés pour couvrir les besoins, même si le nombre des familles pauvres n'a pas cessé d'augmenter depuis le début de ce mois sacré. Les autorités de Cherchell ont fermé la crèche durant le Ramadhan, pour la transformer en un restaurant du Croissant-Rouge algérien (CRA). Selon nos interlocuteurs, un grand nombre de familles déshéritées étaient venues des communes rurales environnantes pour essayer de faire partie du lot des bénéficiaires des repas. En dépit de l'insistance des responsables du CRA,les autorités locales de la majorité des communes de la wilaya de Tipaza, qui arrivent à trouver des prétextes pour se dérober, ne veulent pas s'engager pleinement dans ces actions de solidarité, relatives à la préparation et la distribution des repas pour les familles pauvres de leurs communes. Les responsables locaux se contentent de la distribution des couffins de Ramadhan au profit des familles inscrites dans leur registre. Cette méthode de distribution de dons alimentaires ne semble pas bénéficier d'une transparence dans sa gestion en amont et en aval. Pourtant, l'Etat alloue des milliards de centimes pour faire face à la demande sans cesse croissante des familles démunies. Selon les chiffres de la direction de l'action sociale de la wilaya de Tipaza, le nombre des familles pauvres s'élève à 16 993. « Ce chiffre doit être revu à la hausse », déclare la directrice de l'action sociale. Pour le Ramadhan, la wilaya de Tipaza a bénéficié d'une enveloppe d'un montant de 12,13 millions de dinars. Le ministère du docteur Ould-Abbès a participé avec une somme de 2,6 millions de dinars. En plus de ce geste, des bienfaiteurs généreux ont octroyé des enveloppes financières atteignant les 200 000 DA. Selon les sources de l'administration, 2882 familles pauvres sont inscrites à Koléa, 2489 à Cherchell, 1886 à Bou Ismaïl, 1619 à Fouka, 1618 à Gouraya, 1546 à Sidi Amar, 1412 à Hadjout, 1362 à Damous, 1135 à Ahmeur El Aïn et enfin 1040 à Tipaza. Les statistiques sont ainsi contestées même par la responsable de la DAS, car les chiffres communiqués par les APC ne semblent par exhaustifs. La pauvreté est devenue un chapitre dans lequel beaucoup de personnes ont pu trouver leurs comptes, en raison de l'absence des contrôles et de la transparence. Selon la responsable de la DAS, 2000 couffins consistants et 7112 couffins légers ont été distribués. Le couffin consistant est estimé à 6000 DA, tandis que le couffin léger à 3000. Officiellement, le couffin consistant est constitué de 10 kg de semoule, 5 kg de sucre, 5 kg de farine, 5 l d'huile, 2 kg de riz, 1 kg de café, 1 kg de pois chiche, 1 kg de lait en poudre, 1 kg de sel, 1 kg de vermicelle, 1 kg de tomate concentrée, 500 g de margarine. Le couffin léger est constitué d'1 l d'huile, d'1 kg de sel, d'1 kg de sucre, d'une livre de vermicelle, d'une livre de lait en poudre et de 250 g de café. Les 28 communes de la wilaya de Tipaza ont pu bénéficier de quotas. Le couffin est distribué en fonction du degré de la pauvreté des familles. C'est une solidarité insignifiante pour les familles nombreuses. Si l'Etat a mis les moyens financiers en matière de solidarité, il n'en demeure pas moins qu'il devra procéder à la démocratisation de ce secteur, afin de pouvoir mieux contrôler les dépenses de ces enveloppes financières faramineuses destinées à la solidarité d'une part et la destination réelle de ces actions de solidarité d'autre part. L'opacité avec laquelle est gérée l'action de solidarité entraîne des critiques et des commentaires auprès des citoyens, qui s'interrogent d'ailleurs sur l'efficacité de ces « agitations » sous le couvert de la solidarité au profit des Algériens pauvres. L'Aïd El Fitr est déjà arrivé, les enfants attendent cet événement éphémère, pour oublier leurs affres quotidiennes, en particulier au milieu des zones rurales enclavées.