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Voyage au camp Al Choucha, avec les exclus d'El Gueddafi
Aux frontières tuniso-libyennes
Publié dans El Watan le 15 - 03 - 2011

Ras Jdir. Frontière entre la Tunisie et la Libye l Plusieurs milliers de réfugiés dorment à même le sol, sous un soleil de plomb l Certains n'ont comme bagages que leurs propres vêtements l D'autres empilent sur leur dos ou leur tête, couvertures, draps et quelques objets personnels.
Ras Jdir
De notre envoyé spécial

Egyptiens, Bengalis, Somaliens, Vietnamiens, Burkinabés, Nigérians, près de cent mille personnes ont traversé la frontière qui sépare la Tunisie avec la Libye depuis le 21 février dernier pour fuir l'enfer libyen, selon Firas Kayal, chargé des relations extérieures au Haut Commissariat aux Réfugiés. Aujourd'hui, il reste encore environ 17000 personnes en majorité du Bangladesh, en attente d'être acheminés vers leurs pays.Mohamed Khan est bengali. Il travaille en Libye dans une entreprise de construction chinoise. Avec ses concitoyens, il a fui le pays d'El Gueddafi de peur, dit-il de mourir dans la guerre qui oppose les révolutionnaires aux forces gouvernementales. Le voyage n'était pas de tout repos pour ce travailleur qui a laissé femme et enfants au pays. «Nous avons croisé des dizaines de blindés et près de vingt barrages tout au long de la route. Lors du dernier barrage, un militaire est monté dans notre bus. Il a pris notre argent et nos téléphones portables. Et gare à celui qui s'oppose à la fouille, il est tout de suite descendu du bus et frappé violemment dehors».
C'est le même sort qu'a vécu Mouataz, un Egyptien de 42 ans qui possédait une petite entreprise de céramique à Tripoli. «Je travaille pour des patrons libyens. Mais les deux derniers mois, ils ne m'ont pas payé. Et lorsque j'ai réclamé mon dû, ils m'ont dit que les banques étaient fermées à cause des événements qui secouent le pays». Mouataz, après avoir vendu tout son matériel, a pris la décision de retourner en Egypte via la Tunisie. Mais, il ne se doutait pas de ce qui allait lui arriver, lui aussi, sur la route. «Les militaires ont prix tout l'argent que j'ai gagné, à savoir 2000 dollars environ. Ils ont également confisqué mes deux téléphones portables au cas où j'aurais pris des photos ou enregistré des vidéos sur les événements qui secouent la Libye», m'ont-ils informé.
Il ajoute avec une profonde amertume : «Je suis parti en Libye pauvre, je suis revenu encore plus pauvre. Ce sont mes compatriotes qui m'ont avancé 500 DA pour retourner au pays, autrement je ne serai pas ici».
Les réfugiés appellent gratuitement leurs familles
Les réfugiés qui traversent sans discontinuer la frontière sont accueillis dans le camp «Al Choucha» situé à sept kilomètres environ de la frontière et à vingt de la première ville tunisienne «Ben garden». Le Croissant rouge tunisien, soutenu par l'armée et de nombreuses organisations internationales, a mis en place un dispositif d'accueil assez impressionnant. Plus de 2000 tentes ont été distribuées par le Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR), tandis que le Croissant rouge local ainsi que d'autres associations caritatives distribuent plusieurs milliers de repas chaque jour, grâce notamment aux dons qui arrivent de toute la Tunisie, mais aussi des autres pays arabes, comme les Emirats arabes unis, le Maroc ou l'Algérie.
Mais ce qui importe aussi aux réfugiés, c'est de prendre contact avec leurs familles pour chasser l'inquiétude. Ainsi, deux organisations non gouvernementales, «Télécoms sans frontières» et «Appel du cœur», ont mis à la disposition des réfugiés des téléphones cellulaires en vue de joindre leurs proches en vue de les rassurer. La communication est gratuite.
Elle dure entre deux et trois minutes au maximum. D'après Florian Vichot, responsable de l'ONG «Telecom sans frontières», plus de 6000 numéros ont été composés depuis le 21 février dernier. En effet, il suffit juste de s'inscrire et d'attendre son tour sous une tente dressée à cet effet pour dire un mot à ses proches de l'autre côté du monde.«C'est la première fois qu'un sentiment d'inquiétude m'envahit».
Malika, une vieille dame marocaine d'une soixantaine d'années, a contacté sa famille qui vit dans la ville de Khemissiat au Maroc, grâce à «Télécoms sans frontières». Elle a rassuré sa fille de 16 ans et ses deux frères qui mouraient d'inquiétude pour elle.
La vielle dame marocaine a été accompagnée par son employeur en voiture jusqu'à la frontière tunisienne. Elle a laissé derrière elle 16 ans de vie à Tripoli, où elle travaillait comme femme de ménage dans un hôpital de la capitale. Mais la détérioration du climat sécuritaire a précipité son retour au Maroc, selon elle. «J'ai eu peur en regardant la chaîne arabe Al Jazeera. Elle montrait sans arrêt des scènes de violence et des morts. En 16 ans de vie la bas, c'est la première fois qu'un sentiment d'inquiétude et de crainte m'envahit». Arrivée au camp «Al choucha», Malika a été rapidement installée sous une tente militaire, toute seule. Elle a fait l'objet de toutes les attentions de la part de tous les bénévoles tunisiens qui viennent lui rendre visite toutes les heures pour voir si elle ne manque de rien. Allongée sur un lit, son seul souhait est néanmoins de partir. «Je suis bien traitée ici. Il ne me manque rien. Tout le monde est attentionné et gentil. Mais je suis fatiguée et malade. Ma seule envie est de quitter ce camp et rentrer chez moi. J'ai appelé mon ambassade à Tunis vendredi dernier, mais personne ne m'a répondu. Je compte désormais sur les médecins marocains qui viennent d'ouvrir un hôpital dans le camp pour me rapatrier».
«La Libye, c'est fini pour nous»
Il ne reste pratiquement aucun réfugié arabe dans le camp de «Al choucha», ni dans celui de «Dhehiba» à l'extrême sud de la Tunisie à 40 kilomètres environ de la ville de Tataouine. Les Egyptiens, qui étaient près de 50 000 à passer la frontière tunisienne depuis le début de la révolution en Libye, ont tous regagné leur pays. Plusieurs vols ont été organisés depuis l'aéroport de Djerba, situé à 150 Kms environ du camp. Les autres sont partis par bateau depuis le port de Zarzis. C'est le cas d'Ahmed Hazou, un jeune Egyptien originaire de la ville de Mansourah. Ahmed ne pouvait pas contenir sa joie lorsqu'il a vu de ses propres yeux le bateau militaire de son pays Al Nasser accoster au port de Zarzis pour débarquer 25 tonnes d'aide humanitaire et emmener avec lui des réfugiés en Egypte. «Je suis content de rentrer chez moi. Je ne retournerai jamais en Libye. C'est fini. Durant les manifestations, on est resté cloîtrés à l'intérieur de la maison. On ne pouvait pas sortir de crainte d'être tués par les milices de Kadhafi. Les Libyens disaient que ce sont les Egyptiens et les Tunisiens qui fournissaient les mercenaires en drogue en vue de les combattre. Ce qui, est bien entendu, archi-faux». Et de jurer de ne plus remettre les pieds dans ce pays qu'il décrit comme «violent et arriéré». «Toutes ces personnes-là que vous voyez devant vous ne veulent plus revenir en Libye. Nous voulons désormais travailler dans notre pays et auprès des nôtres».
Drapeau tunisien autour de la tête, son ami Mohamed Abdel Sayeh, originaire de la préfecture de Kana en Egypte, ne tarit pas en éloges sur le travail accompli par les Tunisiens. «La générosité des Tunisiens ne peut pas être quantifiée. Ils nous pris totalement en charge. Sans eux, nous serions peut être morts». Et de décrire le cauchemar vécu sur la route : «J'ai subi plusieurs fouilles corporelles. Les militaires ont pris mon téléphone et les quelques dollars que j'avais sur moi. C'est la première et dernière fois que je vais en Libye».
Les Tunisiens craignent l'arrivée de nouveaux réfugiés
Il faut dire que le rôle des associations tunisiennes était déterminant dans la gestion réussie de la crise et dans la prise en charge des centaines de milliers de réfugiés qui affluaient quotidiennement vers ce pays qui sortait lui aussi de plusieurs mois de troubles politiques et sociaux. «C'est une victoire pour la Tunisie, s'extasie Ahmad Al Touati, spécialiste des premiers secours au sein du Croissant rouge tunisien. Nous n'avons pas rencontré beaucoup de problèmes, mis à part peut-être l'installation des toilettes et l'acheminement de l'eau potable au camp. Mis à part cela, j'estime que nous avons bien pris la situation en main. Pourtant c'est la première fois que nous sommes confrontés à ce genre de situation».
Le même sentiment est partagé par David Nouguera, coordinateur terrain de «Médecins Sans Frontières». «Ici, avoue-t-il, nous n'avons pas grand-chose à faire. Les associations locales aidées par l'armée ont su répondre convenablement à l'urgence». Et d'avouer que la crise humanitaire que tout le monde redoutait n'a finalement pas eu lieu en Tunisie. Il craint cependant que ce ne soit pas la même chose du côté libyen où la situation médicale se détériore jour après jour à cause des violents affrontements entre les insurgés et l'armée de Kadhafi. Le coordinateur affirme que MSF a déjà envoyé une équipe à Tripoli, mais que celle-ci a été refoulée illico presto par les autorités du pays.
Et d'avouer qu'une autre équipe médicale est entrée clandestinement à Benghazi, avec l'aide des médecins libyens pour soigner les blessés et approvisionner les hôpitaux en médicaments et autre matériel médical. Avec le temps, le camp de «Al choucha» est appelé à se vider selon Nabil Ferjani, gouverneur de la région de Mednine dans le sud de la Tunisie. «D'ici une semaine à dix jours, les 13000 Bengalis seront rapatriés vers leur pays à l'aide des avions mis à leur disposition par les Nations unies et certains pays occidentaux». Il explique qu'il est important de dégager de la place dans le camp car l'avenir n'est pas rose du côté libyen. Il craint l'afflux de nouveaux réfugiés. Mais peu importe l'évolution de la situation dans les villes de Zaouïa, de Misratah ou de Tripoli, le camp restera toujours ouvert aux nouveaux arrivants


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