Le discours à la nation, tant attendu, du président de la République ne restera pas dans l'histoire politique de notre pays comme un événement marquant. Cette initiative intervient pourtant dans un contexte exceptionnel. Le monde arabe est en ébullition. Les révoltes populaires ont déjà chassé du pouvoir deux présidents, Ben Ali et Moubarak, considérés comme indéboulonnables. Les effets sur le monde arabe ont été prodigieux. En Libye, au Bahreïn au Yémen, en Syrie… les populations veulent des changements de régime et le font savoir avec détermination. Les dirigeants de ces pays répondent par la répression la plus abjecte. Ailleurs, y compris dans les monarchies les plus conservatrices, les mouvements de contestation se propagent. L'aspiration à la liberté est très forte partout. L'onde de choc se fait sentir dans tout le monde arabe. Notre pays n'«échappe» pas au printemps arabe, à cette lame de fond qui est en train de redessiner la géopolitique mondiale. Le pouvoir a cherché, vainement, à masquer la réalité en désamorçant la colère naissante des Algériens. Les mesures prises au plan social n'ont pas empêché la révolte de prendre de l'ampleur. Le ras-le-bol est général. La nécessité d'engager le pays sur la voie de la réforme politique finit par être admise, même à demi-mot. Mais les engagements d'hier soir du président de la République risquent de décevoir les Algériens. A aucun moment il n'a évoqué la question lancinante du mandant du chef de l'Etat. Il ne rassure pas la population algérienne à ce sujet, sachant pertinemment que son état de santé, visiblement très dégradé, ne lui permet même plus d'honorer une charge extrêmement lourde, en ces périodes d'attentes populaires très fortes. Va-t-il, si Dieu lui prête vie, s'engager encore pour un autre mandat en 2014, comme le suggère le secrétaire général du FLN. Aucun mot ni même la plus petite des allusions… Le monde arabe change à une allure vertigineuse mais nos dirigeants ne prennent pas la mesure de ce qui se déroule sous leurs yeux. Le président de la République propose un simple toilettage de la Constitution en prenant soin de maintenir en l'état l'institution parlementaire dont tout le monde sait dans quelle conditions et comment les députés ont été élus… Le pouvoir fait semblant de reculer, mais en réalité il ne cède pas sur la nature autoritaire et bureaucratique du régime. Le pouvoir cherche à gagner du temps, en espérant que tout rentrera dans l'ordre. Le système politique algérien, qui a failli malgré les exceptionnelles disponibilités financières, doit être revu de fond en comble. La prospérité des Algériens est à ce prix.