Le décret n°62-147 du 23-12-1962 portant interdiction de la consommation d'alcool et de boissons alcoolisées aux Algériens de confession musulmane a rejoint le cimetière des lois jamais appliquées. Son initiateur n'est autre que le fringant président du gouvernement et président du Conseil des ministres de la République algérienne, Ahmed Ben Bella. L'article 1 du décret, très dépouillé, publié en janvier 1963, stipule que la consommation de l'alcool ou de boissons alcoolisées est interdite aux Algériens de confession musulmane sur tout le territoire algérien, dans tous les établissements ou débits de vente réservés à cet effet. L'article 3 de ce décret relève aussi que les Algériens pris en flagrant délit de consommation d'alcool et de boissons alcoolisées seront poursuivis devant les tribunaux de simple police dans le cadre de la législation sur l'ivresse publique. En cas de récidive, une peine de prison pourra être appliquée. La consommation d'alcool n'a pourtant pas cessé du temps de Ben Bella. Sans abroger le texte, le nouveau pouvoir, arrivé aux commandes en 1965, adopte une loi (65-252) qui réserve l'octroi des licences de débits de boissons alcoolisées aux seuls anciens moudjahidine et aux veuves et ascendants directs de chouhada. Consécutif au coup de froid entre l'Algérie et la France, le président du Conseil de la révolution, l'austère Houari Boumediène, a pris la décision d'arracher les vignobles avant de décider, cinq ans plus tard, d'adopter un décret relatif à la réglementation administrative des débits de boissons. Les penchants prohibitionnistes sont apparus après la résurgence de la mouvance intégriste durant la dernière moitié du XXe siècle. La loi de finances de 2004 a interdit l'importation de certaines liqueurs. Un débat byzantin s'en est suivi sur la tenue des textes en arabe et en français et le texte a été finalement abrogé. Mais ce qui a le plus fait du tort à la profession est l'instruction du ministère du Commerce (88 /MC/DOM/06 du 30 janvier 2006) qui soumet à autorisation les activités de débit de boissons. Le hic est que cette instruction, adoptée du temps de l'ancien ministre du Commerce, Djaboub, qui a perdu son maroquin, à la faveur du dernier remaniement ministériel, est en contradiction avec la réglementation, surtout celle de 1975.