Fort d'une expérience de 30 ans, Abdou Elaïdi n'écarte pas la possibilité de revenir en Algérie pour monter une pièce théâtrale. Comédien, auteur et metteur en scène, Abdou Elaïdi, originaire de Maghnia, vit en France depuis près de 30 ans. Il arrive à Grenoble en 1983 où il démarre une carrière de comédien avec plusieurs compagnies. Cofondateur de la compagnie Nomad's Land Theatre, sa première création Les champs de couscous ne donnent plus de blé fut couronnée par plusieurs prix (plus de 750 représentations en France et à l'étranger). Il a travaillé, entre autres, avec Jérôme Savary et Mohamed Fellag, il a aussi écrit, monté et interprété plusieurs pièces dont celle de Kaceb Yacine Mohamed prends ta valise, Des fleurs pour Algernon de Daniel Keyes. Sa toute dernière Sale guerre pour Marcel a été jouée, samedi 5 novembre, au théâtre Prémol de Grenoble. En fait, il s'agit de quatre personnages qui se croisent tous les jours, dont Marcel, nommé l'Ancien, ayant participé à la guerre d'Algérie. Après des années d'amnésie et ses noyades dans l'eau-de-vie, sa mémoire est dépoussiérée et se retrouve face aux souvenirs de la sale guerre. Les langues se mettent à se délier. Abdou Elaïdi en parle : «Comment parler d'un frère qui a vécu la guerre sans jamais en parler ? Comment parler de ce frère qui s'est enfermé dans le silence et l'alcool dès son retour jusqu'à la disparition ? Hélène Gaud, comédienne aussi, m'a demandé s'il était possible de raconter la vie de son frère, Pierre. Sans hésiter, étant emballé par l'histoire, j'ai répondu ‘‘oui'' sans me poser la question suivante : ‘‘Est-il possible de faire parler le silence ?''» Et d'ajouter «‘‘Sale guerre pour Marcel'' ne peut se réduire à une simple pièce théâtrale à jouer, mais doit permettre d'initier des discussions aussi bien avec des adultes qu'avec des scolaires. Nous avons tous dans notre entourage des personnes murées dans leur silence, quelle que soit l'origine de ce dernier…» Abdou Elaïdi, pour rappel, est le premier à avoir adapté Les martyrs reviennent cette semaine de Tahar Ouettar en 1981 et jouée à Mostaganem, lors du Festival du théâtre amateur. Un retour au bercail ? «Pourquoi pas… pour jouer une de mes pièces ?», dit-il avec nostalgie.