Les entrepreneurs algériens sont irrités. Pour eux, il y a une « volonté politique » qui les empêcherait de mener à bien leurs projets en Algérie. Certains hommes d'affaires présents hier à la conférence-débat d'El Moudjahid à l'exemple du patron de Cévital, Issad Rebrab, et celui de la Confédération du patronat (CIPA), M. Mhenni, ont regretté que les pouvoirs publics leur mettent des bâtons dans les roues pour, estiment-ils, empêcher la réalisation de leurs projets de partenariat avec des entreprises publiques. L'Etat algérien aurait donc choisi son camp : que ce soit pour la privatisation des entreprises publiques ou pour le partenariat, il opte systématiquement pour les groupes étrangers. Pour Issad Rebrab, l'Etat devrait tenir compte de l'apport des entreprises privées. En 2004, le groupe Cévital, souligne-t-il, a apporté au budget de l'Etat plus de 8 milliards de dinars. « Les entreprises étrangères, elles, ne payent pas d'impôts (IRG). Alors que pour les entreprises privées, l'Etat est le principal actionnaire du fait des prélèvements fiscaux importants », précise-t-il. A l'heure du patriotisme économique, si l'Algérie tend à se développer, elle devrait miser, insiste-t-il, sur ses grandes entreprises. « L'on sent dans les mentalités de certains décideurs une peur des grandes entreprises (...) il ne faut pas diaboliser les richesses », tranche-t-il. Pour étayer ses propos, il s'appuie sur les nombreuses demandes de partenariat infructueuses. Il confie qu'à maintes reprises, les chefs des entreprises publiques avaient donné leur accord de principe mais ont dû, quelques jours plus tard, revoir leur position. « Nous avons de grands projets de partenariat (notamment avec l'ENIE et la SNVI), mais il faut attendre la bénédiction des pouvoirs publics », soupire M. Rebrab. S'estimant lésé par rapport aux groupes étrangers qui donnent l'image d'apporter leur « savoir-faire », il affirme que « la technologie s'achète ». Le président de la Confédération des industriels et producteurs algériens (CIPA), Abdelaziz Mhenni, embraye : « Il y a un grand décalage entre le discours officiel et l'application sur le terrain. Les entreprises algériennes sont en hibernation. J'ai introduit pas moins de 13 demandes de partenariat, mais je n'ai, à ce jour, obtenu aucune réponse. » La situation actuelle est d'autant plus grave, aux yeux du patron de Saïdal, que la privatisation, telle qu'elle est appliquée actuellement, risque de « bloquer tout le système ». « On tourne en rond », soutient M. Aoun. Et d'enchaîner : « Il y a trop de niveaux de décision pour ces opérations (entreprise, SGP, CPE...). » Si l'investissement privé n'a pas encore atteint les résultats escomptés, c'est lié, d'après Ali Aoun, au manque de mesures incitatives des pouvoirs publics. Les entrepreneurs présents au débat d'hier s'accordent à dire que le système de privatisation doit être revu d'autant que s'ils achètent l'entreprise à un prix exorbitant, ils ne pourront plus investir convenablement. L'idéal serait donc de miser beaucoup plus sur « un plan de relance » que sur les capitaux.