Une semaine après son lancement, la campagne pour les élections locales du 29 novembre va dans tous les sens. Inconsistante et sans connexion aucune avec la réalité des problèmes dont souffrent les citoyens. Les discours servis par les responsables des partis politiques et certains candidats ne sont en réalité que la résonance du climat politique délétère qui sévit dans le pays. En réalité, depuis que les Assemblées populaires communales et de wilaya ont perdu le peu de prérogatives qui leur restaient, que leur rôle s'apparente désormais à celui de Netcom, le maire ne peut ni construire des logements ni créer de l'emploi, encore moins être un vecteur du développement local, personne ne croit plus à l'élection municipale. Elle ne constitue plus un enjeu, puisque tout est concentré entre les mains de l'administration. Lors de l'université d'été de son parti, le Front de libération nationale (FLN), Abdelaziz Belkhadem avouait qu'«il ne faut pas demander des miracles à un président d'APC parce qu'il n'en a pas les moyens». Une déclaration que le secrétaire général du FLN semble oublier puisqu'il a entamé sa campagne en disant le contraire, que «les élus locaux bénéficient de larges prérogatives». Un simple coup d'œil dans le nouveau code de la commune suffit pour savoir qu'un maire ne vaut rien devant les représentants d'une administration centralisée à l'extrême. De l'avis d'un ex-élu, dans une circonscription comme Alger, le wali délégué peut remettre en cause une délibération d'une Assemblée communale. Loin donc des préoccupations réelles de la collectivité, Abdelaziz Belkhadem rive son regard sur d'autres enjeux, visiblement, encore plus intéressants pour lui : son maintien à la direction du FLN et, de fil en aiguille, l'élection présidentielle de 2014. Quand il déclarait avant-hier qu'il quitterait son poste si son parti n'obtenait pas la majorité dans 1000 communes, Abdelaziz Belkhadem n'a fait, dans le fond, que dévoiler sa préoccupation du moment, au détriment de celle du citoyen lambda. Le message du secrétaire général du FLN trahit son irrépressible, apparemment, désir de rester aux commandes de son parti en narguant, au passage, ses contestataires qui veulent s'en débarrasser. Ainsi donc, en voulant montrer avoir pied au local, le responsable de l'ex-parti unique a la tête ailleurs. En plus s'il y a des comptes à rendre sur le délabrement national, les élus du FLN et sa direction en sont les premiers concernés. On ne peut gérer une commune pendant de longues années et venir avec autant de culot se proposer à la solution des problèmes que vivent les Algériens. Surtout lorsqu'on est une partie du problème. Le Rassemblement national démocratique (RND), qui connaît lui aussi un mouvement de contestation dans ses rangs, aborde les prochaines élections presque sous le même angle. Son secrétaire général, Ahmed Ouyahia, qui se dit «serein» et ignorer ses pourfendeurs, donne l'air d'avoir un seul souci, celui de vanter les «réalisations» du président de la République : le logement, les routes et autres infrastructures. Dans une campagne morose, qui peine à démarrer, Ahmed Ouyahia a préféré surfer sur des généralités avec le besoin ardent d'insister sur son infaillible loyauté présidentielle. Dans son discours prononcé dans la wilaya de Laghouat, le patron du RND a plutôt versé dans la langue de bois. Pour lui, «la prochaine consultation tire son importance du rôle attendu des assemblées populaires communales et de wilaya pour la prise en charge des attentes quotidiennes des citoyens, la promotion de la mission des assemblées et de leurs spécificités de développement, et la lutte contre les aspects négatifs, notamment la bureaucratie, pour peu que les élus montrent loyauté et probité et se mettent au service de la communauté». Trop peu dit sur les institutions locales, lorsqu'on a eu à assumer des responsabilités dans les différents échelons de la hiérarchie de l'Etat ! Le Parti des travailleurs (PT) ne sort pas de cette ambiance. La formation de Louisa Hanoune distille deux discours : le premier est que l'élu local n'a pas de prérogatives, un des responsables du parti, intervenant sur les ondes de la Radio nationale, dénonçait le fait que «le rôle du maire est la collecte des ordures et l'état civil», le second se résume dans la devise électorale du PT, «Prémunir la nation». A en décoder que la participation du Parti des travailleurs aux élections du 29 novembre n'est motivée que par ce seul souci. Le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) n'attend, lui, presque rien de cette échéance, sinon faire régner la transparence dans la gestion locale. Beaucoup d'autres voix appréhendent cependant la fraude électorale. Un cocktail bien désespérant pouvant décourager les plus téméraires des électeurs. Parce que tout le monde sait que «le pouvoir local» n'en est pas un.