Le parti au pouvoir, Ennahda, accuse les éléments de la mouvance Ançar charia de vouloir saper l'autorité de l'Etat l Les médias ont focalisé durant les trois derniers jours sur le différend opposant les salafistes radicaux d'Ançar charia au ministère tunisien de l'Intérieur. Tunis De notre correspondant Ennahda, le parti au pouvoir en Tunisie, a fini par annoncer la guerre contre les salafistes djihadistes du mouvement Ançar charia qui ne veulent pas respecter l'autorité de l'Etat. C'est hier que Rached Ghannouchi a fait cette déclaration de guerre. Rached Ghannouchi s'est montré ferme hier contre la tendance salafiste rigoriste qui «ne veut pas respecter l'Etat musulman». «C'est anti-islamique de combattre les musulmans», a insisté le leader d'Ennahda. L'homme fort de la Tunisie a attaqué le double jeu des salafistes. «Ce n'est pas admissible qu'ils prônent la démocratie et se déclarent partie intégrante de la société civile alors que leur discours est violent et qu'ils appellent à la haine», a-t-il déclaré. «L'Etat ne saurait accepter cela», a-t-il insisté. L'organisation de la conférence de presse d'hier aurait été décidée à la dernière minute. C'est la décision du gouvernement d'interdire la manifestation de Ançar charia qui aurait convaincu la hiérarchie politique d'Ennahda de se mettre aussi sous les projecteurs et de communiquer. Les médias ont focalisé durant les trois derniers jours sur le différend opposant les salafistes radicaux de Ançar charia au ministère tunisien de l'Intérieur concernant la tenue des troisièmes assises de cette mouvance à Kairouan. Le ministère de l'Intérieur a hésité durant trois jours avant de prendre sa décision. Ançar charia tisse des liens avec les djihadistes Trois raisons sont à l'origine de l'hésitation de ce ministère qui possède désormais un nouveau ministre indépendant, Lotfi Ben Jeddou. Celui-ci a, en effet, remplacé l'islamiste Ali Larayedh depuis un peu plus de deux mois. D'abord, cette mouvance, Ançar charia, n'a pas d'existence légale, quoi que la demande d'autorisation a émané d'associations de la société civile, proches de cette tendance. Ensuite, les responsables du mouvement Ançar charia avaient tenu leurs assises à Kairouan durant les deux dernières années sans se faire réprimander par le ministère de l'Intérieur, malgré le discours violent qui a caractérisé leurs manifestations. Il s'agissait carrément d'une démonstration de force pro-Al Qaîda où même le slogan «Obama, Obama, kolna Oussama», a été scandé par des milliers de voix, en hommage à Oussama Ben Laden. La grande suspicion qui plane sur les liens entre cette mouvance et la cellule «Okba Ibn Nafaâ», implantée au mont Chaâmbi, à la frontière algérienne, depuis des mois et qui est pourchassée par les forces de l'ordre et l'armée tunisienne, a fini cependant par convaincre les autorités d'agir. D'ailleurs, les dernières arrestations ont confirmé ce lien structurel entre Ançar charia et la cellule djihadiste. Face à de tels éléments, la direction d'Ennahda ne pouvait se permettre un nouveau ratage, surtout qu'elle a été accusée de complaisance à l'égard des djihadistes. D'où sa déclaration de guerre d'hier. Les observateurs s'interrogent toutefois si le bras de fer engagé avec les salafistes n'est pas un coup de poker du ministre Lotfi Ben Jeddou. En tout cas, les observateurs retiennent qu'Ennahda a attendu le départ de Ali Larayedh du ministère de l'Intérieur pour agir. Est-ce un hasard ou une manière de faire porter le chapeau à M. Ben Jeddou dans le cas où la situation tournerait au vinaigre ? L'avenir nous le dira bien assez vite.