La Fête de la femme est arrivée au bon moment pour rappeler aux Tunisiennes les risques encourus par leurs acquis, obtenus depuis des décennies. L'opposition exploite donc cette opportunité pour continuer sa pression de rue sur Ennahdha, afin d'essayer d'aboutir à un consensus politique acceptable autour du nouveau gouvernement. Le mouvement Hareyer Tounes (Femmes libres de Tunisie) a appelé à une marche, aujourd'hui à partir de 18h, de la place Bab Saâdoun à la place du Bardo, pour commémorer le 57e anniversaire de la promulgation du code de statut personnel. Les organisateurs s'attendent à des dizaines de milliers de manifestants, comme ce fut le cas, le 6 août, lors de la commémoration de l'assassinat de Chokri Belaïd. La question de la femme est l'une des problématiques sensibles qui mobilise la rue. Les islamistes d'Ennahdha étant toujours suspectés de vouloir s'attaquer au statut de la femme en Tunisie, qui a fait d'elle une exception positive dans le monde arabo-musulman. La loi tunisienne considère la femme quasi égale de l'homme, ce qui n'est pas le cas ailleurs. Conjoncture Ce 13 août 2013 survient alors que la Tunisie vit un véritable bras de fer entre Ennahdha et l'opposition, suite à l'assassinat, le 25 juillet dernier, du constituant Mohamed Brahmi. Depuis, une soixantaine de membres de l'Assemblée ont suspendu leur adhésion, ce qui a poussé Mustapha Ben Jaâfar à geler les activités de la Constituante, confirmant ainsi le blocage politique régnant dans le pays. Un sit-in de ces constituants réfractaires est observé depuis le 29 juillet devant l'ANC. Ils ont été rejoints par plusieurs dizaines de jeunes et de citoyens de l'intérieur du pays. Tous ne jurent que par la chute du gouvernement et la dissolution de l'Assemblée nationale constituante. «Le peuple en a marre. Il veut que l'on parvienne à installer un gouvernement de compétences qui veillera à la tenue des échéances électorales», précise Bouchra Belhaj Hmida, avocate et membre de la direction de Nidaa Tounes, principal parti d'opposition. L'universitaire Jalila Saâdi, présente également au Bardo, affirme que «le petit peuple, ayant fait la révolution, n'a rien obtenu durant ces trois dernières années, sinon la hausse des prix. Il veut chasser Ennahdha du pouvoir». Blocage S'il est vrai que les tractations ne s'arrêtent pas entre les différents acteurs de la scène politique, les résultats tardent à se concrétiser sur le terrain. Hier, l'ex-Premier ministre et leader de Nidaa Tounes, Béji Caïd Essebsi, a rencontré son allié, le porte-parole du Front populaire, Hamma Hammami. Les quatre organisations de la société civile (UGTT, UTICA, LTDH et Ordre des avocats) ont tenu une réunion de concertation pour peaufiner leurs positions respectives par rapport aux tractations en cours. Dans l'après-midi, une réunion a regroupé Hassine Abbassi, secrétaire général de l'UGTT avec Rached Ghannouchi, leader d'Ennahdha, en présence du président de l'Assemblée nationale constituante, Mustapha Ben Jaâfar. Les observateurs comptent beaucoup sur cette rencontre pour débloquer la situation politique. Ghannouchi serait sur le point de lâcher Ali Laârayedh et d'accepter la dissolution du gouvernement. Mais quelle sera la contrepartie ? La Fête de la femme vient donc alors que la Tunisie traverse une passe délicate.