Alors que la France officielle a reconnu les souffrances des Algériens lors de la répression de la manifestation du 17 octobre 1961, dont on a commémoré hier le 52e anniversaire, le mouvement associatif anticolonialiste et antiraciste continue à réclamer la reconnaissance de «ce crime d'Etat». Hier matin, sur le pont Saint-Michel, l'ambassadeur d'Algérie à Paris, Amar Bendjama, et le maire de Paris, Bertrand Delanoë, ont déposé des gerbes de fleurs devant la plaque commémorative, dédiée à la mémoire des victimes du 17 Octobre 1961. «Cette plaque symbolique, que j'ai inaugurée en 2001, rend hommage aux Algériens victimes du drame de 1961. Il fallait dire la vérité. Cette répression sanglante et barbare reste une tache dans l'histoire de Paris. Mais maintenant, c'est le temps du vivre-ensemble», a déclaré le maire de Paris devant le nouvel ambassadeur algérien. Sur le même lieu symbolique, plus tard dans l'après-midi, devait se tenir un deuxième rassemblement, organisé par le Collectif du 17 Octobre, avec la participation de plusieurs associations, syndicats et partis politiques. Les mêmes activités commémoratives, par ailleurs, devaient être organisées en Ile-de-France (Nanterre, Aubervilliers, Gennevilliers, etc.) et dans plusieurs grandes villes de province comme à Lyon et Rennes, ou encore à Strasbourg, où l'une des places publiques du centre-ville est rebaptisée «place du 17 Octobre 1961». Le Collectif 17 Octobre 1961 réclame la reconnaissance par la France d'un crime d'Etat. Alors que la guerre de Libération nationale algérienne touche à sa fin, après sept ans de lutte armée, les Algériens manifestent pacifiquement, à Paris, contre le couvre-feu qui leur était imposé depuis le 5 octobre 1961. La police française, sous la houlette de Maurice Papon, a été sans pitié. La répression s'abat sur des milliers de manifestants, dont des centaines sont tués et jetés dans la Seine. L'année dernière, le président français, François Hollande, déclarait : «Le 17 octobre 1961, des Algériens qui manifestaient pour le droit à l'indépendance ont été tués lors d'une sanglante répression. La République reconnaît avec lucidité ces faits. Cinquante et un ans après cette tragédie, je rends hommage à la mémoire des victimes.» Si cette démarche est considérée comme un pas important vers la réconciliation des mémoires entre l'Algérie et la France, elle reste néanmoins «insuffisante», selon Henri Pouillot, l'un des membres très actifs du Collectif associatif du 17 Octobre 1961. «52 ans après, la vérité est en marche. Cependant, la France n'a toujours pas reconnu sa responsabilité dans les guerres coloniales qu'elle a menées, – en particulier la guerre d'Algérie – non plus que dans le cortège de drames et d'horreurs qu'elles ont entraînés, comme ce crime d'Etat que constitue le 17 octobre 1961. L'an dernier, le président de la République a certes fait un premier pas important… Mais le terme de crime n'est pas repris, et la responsabilité, sous-entendue, n'est pas clairement définie», écrit-il dans son blog. Dans un communiqué, rendu public le 9 octobre, le Collectif du 17 Octobre définit sa revendication indéfectible, encore insatisfaite, dans la «reconnaissance et la condamnation de ce crime d'Etat» par l'Etat français. Le collectif réclame également d'«ouvrir largement les archives (dans un cadre franco-algérien, indépendant) pour que toute la vérité soit enfin connue et que justice puisse être rendue».