Le cinéma marocain n'est pas venu à Alger pour faire de la figuration. Et pour cause ! Il a raflé six prix dont le très convoité Amayas d'or du meilleur film pour Les chevaux de Dieu de Nabil Ayouch. Le celluloïd marocain a crevé l'écran à l'issue de la toute première, fraîche et émoulue édition du Festival maghrébin du film, à Alger, s'étant déroulé du 3 au 8 novembre à la salle El Mougar et à la Cinémathèque algérienne où 35 films (documentaires, courts et longs métrages) y ont été projetés. Aussi, le Maroc en remportant haut la main le grand prix régalien, l'Amayas d'or du meilleur film pour le film de Nabil Ayaouch Les chevaux de Dieu, ainsi que ceux du meilleur scénario pour Zéro de Nourredine Lakhmari, le meilleur documentaire avec Dance of Outlaws de Mohamed El Aboudi, meilleur court métrage avec Entropya de Yassine Marco Maroccu, le prix spécial du jury (documentaire) pour Margelle de Omar Mouldouira et de meilleure actrice, Jalila Tlemci pour sa performance dans le film Androman de Aziarabe Aloui. Soit six distinctions ! Une razzia ! Un revival filmique marocain à saluer tout bas, montrant et démontrant une qualité, une dextérité, un potentiel maghrébin. Nabil Ayouch (Mektoub, Ali Zaoua, Whatever Lola Wants, My Land), qui n'est plus à présenter, avec Les chevaux de Dieu, il signe un film poignant, violent, fort, émouvant et très intense. Leçon du cinéma Un drame humain pour ne pas dire «infra humain». Celui des desperados, les laissés-pour-compte, les marginalisés, les oubliés de la société… Ceux du bidonville de Sidi Moumen vivant dans l'indigence, la promiscuité, la désolation et dans une telle détresse humaine, désespoir… Le pitch ? Ils s'appellent Hamid, «Yachine», Nabil et Fouad. Ils ont 20 ans. Ils habitent un bidonville de Casablanca (Maroc). Ils ont la beauté du diable ! Ils aiment le football. Un jour, ils basculent dans le terrorisme islamiste. En mai 2003, ils commettent un attentat suicide. Nabil Ayouch filme à la manière de Danny Boyle (remember Slumdog Millionaire, les bidonvilles de Mumbai). Avec une emphase sur des séquences aériennes exhibant l'ampleur de ce «no man's land». Le bidonville de Sidi Moumen, une «cour des miracles», où l'islamisme terroriste trouvera son terreau. Aussi, Nabil Ayouch adoptera une trame pédagogique, présentant les causes et effets, voire les conséquences de l'islamisme entretenu par le prosélytisme, l'embrigadement et le lavage de cerveau des jeunes désespérés. Ce film ne laisse personne indifférent. Nourredine Lakhamari, auteur du sublime Zéro, sera congratulé copieusement et chaleureusement et soutenu par un public acquis à son talent, scandant : «Zéro, Zéro... !». Une caution du public pour le très bon Zéro. Le verdict du public était éloquent ! Le nouveau long métrage du réalisateur de la nouvelle vague marocaine, Nourreddine Lakhmari, révélé par Casanegra, est une intrigue policière plongeant un inspecteur, Zéro, incarné par le flegmatique Younès Bouadès dans un «character» crédible. Une histoire d'un flic ripou fréquentant un monde interlope nocturne marqué par la corruption, le vice, le sexe, la drogue… De front, Nourredine Lakhmari dévoile une certaine hypocrisie de la société. Une brillance et du talent brut de décoffrage à revendre. Le long métrage tunisien Le professeur de Mahmoud Ben Mahmoud a reçu le prix spécial du jury. Le prix spécial du jury dans la catégorie «documentaires» a été décerné au jeune et doué Abdenour Zahzah (remember Garagouz) pour El Oued El Oued (Algérie). Celui du court métrage (prix spécial du jury) a été remis à Anis Lassoued pour Les Souliers de l'Aïd (Tunisie). L'acteur Khaled Benaïssa a reçu le prix du meilleur acteur pour le film Le Repenti de Merzak Allouache et le réalisateur Menad Embarek (Algérie) s'est distingué avec Iminig, un court métrage dévoilant un potentiel. Bref, faites du cinéma… maghrébin !