Fuyant le centre de Rome, choisi par les propriétaires saoudiens de la chaîne concurrente Orbit, les responsables de Arab Radio and Television (Art) ont préféré construire leurs studios dans la petite localité de Avezzano. En douze ans, à peine, ce groupe médiatique a réussi le pari de rafler la mise, en s'octroyant l'exclusivité des droits de transmission des programmes sportifs dans le monde arabe. C'est en 1993 que le milliardaire saoudien cheikh Salah Abdallah Kamal, flairant une affaire juteuse, a investi dans une petite localité à 62 km au nord de Rome, surprenant les habitants du lieu qui, à chaque visite de délégations saoudiennes, suivaient du regard, mi-amusés mi-méfiants, la longue file de Mercedes noires qui parcouraient les rues étroites de la petite commune. Mais derrière la stratégie de lancement de ce groupe réside le génie du magnat des médias, le Franco-Tunisien Tarek Ben Ammar, ami de Silvio Berlusconi et conseiller du principal actionnaire de Art, à l'époque, le prince saoudien Al Walid. Environ 500 techniciens, journalistes et autres spécialistes de l'audiovisuel, dont la moitié d'origine arabe, ont été recrutés pour assurer la diffusion d'une demi-douzaine de chaînes satellitaires. L'histoire de Art commence exactement à Ortucchio (nord de Rome), à la station de transmission spatiale de Telespazio, où, à partir d'octobre 1993, des programmes de divertissement sont transmis, via le satellite, aux pays du Moyen-Orient et d'Europe. Au début, quatre chaînes étaient conçues pour les téléspectateurs arabes. Une chaîne diffusant des programmes culturels et de variétés, une autre de sport, une troisième des émissions pour enfants et une autre des longs métrages cinématographiques. Le succès obtenu par le groupe a drainé les meilleurs professionnels de Orbit, qui, attirés par des salaires mirobolants, ont déserté les studios romains pour ceux de Avezzano. A présent, seuls une cinquantaine d'employés sont restés au siège mère, pour assurer la transmission d'une partie des programmes acquis par le groupe et une production réduite au strict minimum, depuis que la direction a préféré transférer, il y a cinq ans, ses studios à Amman, en Jordanie, où les coûts de production sont beaucoup moins onéreux que dans la capitale italienne. Décision qui a inspiré les patrons saoudiens de la chaîne rivale Orbit, qui a choisi le Bahrein pour se redéployer, évitant de justesse la faillite. L'Italie, hors de prix pour les groupes médiatiques arabes, a porté plutôt chance aux actionnaires de Art qui sont parvenus même à acquérir et à distribuer des productions de chaînes privées italiennes en Australie et dans les pays de l'Amérique du Sud. Ce groupe, qui a investi dans la télévision de loisirs, possède 16 chaînes, dont le bouquet Arabesque qui compte huit chaînes, dont Art Hekayat, Art Teenz, Art Movies, Art Movies 2, Art Cinéma et Art Tarab.