La reconduction du statu quo autoritaire face à l'exigence d'ouverture démocratique. Le combat s'avère inégal. L'Algérie se prépare à subir un scrutin présidentiel qui, à l'évidence, présente toutes les caractéristiques d'une «compétition» asymétrique. L'annonce par procuration de la candidature de Abdelaziz Bouteflika à sa propre succession a plongé l'opinion nationale dans la stupéfaction. Elle a enfoncé de larges pans de la société dans une «indignation passive», à la limite d'une inquiétante résignation. Les opposants à un quatrième mandat, aussi disparates que dispersés, refusant la capitulation, s'emploient tout de même à livrer bataille. Convergences sur l'objectif et profondes divergences sur la stratégie et les moyens d'y parvenir. Dans ce camp, la polémique enfle entre partisans du boycott en raison d'une élection verrouillée au profit du candidat du système et les participationnistes qui, eux, comptent briser les chaînes de la fatalité en misant sur une possible dynamique dans la société. Mouloud Hamrouche est, sinon le seul, du moins l'un des rares hommes politiques à avoir saisi au vol cette occasion offerte pour relancer le débat sur les réformes démocratiques à même de mettre fin à une crise politique qui n'a que trop duré. Le chef de file des réformateurs se place manifestement au-delà du conjoncturel pour tenter de faire admettre aux uns et aux autres la nécessité d'imprimer au pays un changement démocratique sans heurts. Son intervention dans le débat national a été accueillie comme une aubaine pour toutes les parties politiques en attente d'une issue à l'impasse dans laquelle le pays est piégé. Plutôt que de foncer tête baissée, ainsi que semblent le faire les équipes dirigeantes actuelles, avec tout ce que cela implique comme conséquences fâcheuses, Hamrouche propose ni plus ni moins un retour à la légitimité démocratique, et ce, en jetant les bases de nouvelles négociations, seul gage de succès d'un compromis salvateur. Il appelle et convie les détenteurs du pouvoir à saisir les «opportunités» qu'offre la crise pour revoir les termes et les conditions d'un nouveau contrat politique et social entre l'Etat et la société. «Faut-il rappeler, ici et maintenant, que la renaissance de notre identité algérienne et notre projet national ont été cristallisés, abrités et défendus successivement par l'Armée de libération nationale puis par l'Armée nationale populaire ? Cela n'a été possible que grâce aux hommes qui ont su trouver des compromis et élaborer des consensus», a-t-il affirmé dans son appel aux décideurs, le 17 février dernier. S'il est reproché, à tort ou à raison, à l'ancien chef de gouvernement de Chadli de ne s'adresser qu'aux décideurs, il a sans nul doute créé une attente au sein de l'opinion publique. D'où la question de savoir, aujourd'hui, s'il compte rompre définitivement le silence pour s'installer durablement dans l'arène politique en acteur actif, capable d'impulser une dynamique de changement telle qu'il a appelée de ses vœux. Il apparaît clairement que l'homme ne fait plus mystère de sa non-participation à l'élection présidentielle, mais il est appelé à peser de tout son poids dans les échéances politiques post-17 avril. Il convient enfin de souligner que Hamrouche n'est pas le seul à avoir pris une initiative politique. D'autres, comme lui, et non des moindres – Djamel Zenati, Saïd Sadi, Ahmed Taleb Ibrahimi, Ali Yahia Abdennour et d'autres – se sont précipités pour occuper le devant de la scène, chacun avec ses mots, afin de faire montre de leur disponibilité et de leur volonté d'amorcer le virage du changement tant désiré. Tous ces acteurs, dont l'ancrage populaire et l'autorité politique et morale ne sont plus à démontrer, sont interpellés, aujourd'hui plus que jamais, à l'image de ce qui se passe chez nos voisins tunisiens notamment, sur l'urgence de réussir, dans la convergence, à imposer une alternative démocratique au périlleux statu quo qui menace le pays.