Azzedine Taïbi est tête de liste du Rassemblement de la gauche de la ville de Stains (Seine-Saint-Denis). Pour la première fois en France, un homme politique d'origine maghrébine pourrait être élu maire d'une ville de plus de 35 000 habitants. Son projet : «un nouvel élan populaire à Stains». -Comment avez-vous été plébiscité tête de liste de toute la gauche dans une ville de plus de 35 000 habitants et à proximité de Paris ? J'ai 49 ans et je vis à Stains depuis presque 30 ans, après avoir quitté le Val-de-Marne. Je suis issu d'une famille ouvrière d'origine algérienne. Mes parents, originaires de la petite Kabylie, près d'Akbou, ont immigré en France dans les années 1950. Mon père était ouvrier et ma mère femme au foyer. Tout cela m'a inculqué une certaine culture depuis mon jeune âge, plutôt à gauche. J'étais encore étudiant quand j'ai commencé à travailler dans l'animation et l'éducation populaire. A Stains, je me suis fait beaucoup d'amis dans le milieu associatif. Après quoi, j'ai décidé d'abandonner les études pour m'installer à Stains et me consacrer à mon travail. C'est là que j'ai fait connaissance avec des membres du Parti communiste français (PCF) auquel j'adhère avec conviction. Je m'occupais du travail de proximité avec les jeunes des quartiers. En 1989, je me suis présenté pour la première fois aux élections locales sur la liste du PCF, conduite par l'ancien maire de Stains, Louis Pierna. J'avais juste 24 ans. Puis, à partir de 1995, je suis rentré dans l'exécutif en tant que maire-adjoint. En 2001, j'ai été élu de nouveau maire-adjoint et aussi conseiller-général du canton de Stains. Mon engagement politique a toujours été sur le terrain et dans le travail de proximité avec la population. Je me consacrais surtout à la réussite des projets liés à l'éducation populaire, un sujet qui me tient à cœur. Cette fois, mon parti m'a demandé de me présenter comme candidat au poste de maire, en remplacement du maire communiste sortant. Evidemment, il y a eu une primaire au PCF. Plus de 75% de mes camarades ont voté pour moi. Puis les autres formations de gauche, notamment le parti socialiste et les Verts nous ont rejoints et soutenus. -Quelles sont vos chances de remporter cette élection ? Toute la gauche est derrière nous, les écologistes et les socialistes particulièrement. Les citoyens de Stains m'interpellent dans la rue depuis qu'ils ont appris ma candidature pour me féliciter et m'assurer qu'ils m'accorderont leurs voix. Cette confiance qu'ils me font, dont je suis très fier, est due surtout au fait que les gens me connaissent très bien et savent d'où je suis parti pour arriver là. Pour la majorité d'entre eux, ma candidature est un choix évident et logique. -Et que pense la communauté maghrébine, très forte à Stains, de votre candidature ? Cela m'aide encore plus de recevoir le réconfort de mes concitoyens français originaires des pays du Maghreb et du continent africain. Ils sont fiers d'avoir, enfin, la possibilité de contribuer à placer au poste de premier magistrat de leur ville quelqu'un qui leur ressemble. Même si je ne me focalise pas sur cet aspect, il est vrai que ma candidature est très symbolique puisque je serai, si les Stanois me choisissent, l'un des très rares maires français d'origine algérienne et maghrébine en général à la tête d'une ville importante de plus de 35 000 habitants. Si mon éventuelle élection peut aider à provoquer un sursaut citoyen et encourager les membres de cette communauté, notamment les jeunes, à s'intéresser davantage à la chose politique, cela me convient. Et je suis prêt à assumer pleinement ce rôle de symbole. Néanmoins, je tiens à préciser que même chez mes autres concitoyens, dits Français de souche, il y a une certaine joie et une satisfaction de voir quelqu'un, apprécié et reconnu sur le terrain, être tête de liste de toute la gauche stanoise. J'ai tout le temps travaillé pour le rassemblement de toutes les communautés et la lutte contre les clivages. A Stains, nous sommes tous des citoyens à part entière, quels que soient nos parcours et nos origines. Nous formons un socle commun. J'aborde cette échéance électorale avec beaucoup d'humilité en misant tout sur notre programme. -Alors, parlez-nous un peu de votre programme... Notre programme se décline sur trois axes très importants : l'éducation, l'environnement et le cadre de vie, et enfin la démocratie participative. La participation des citoyens dans les décisions importantes et leur implication au cœur de l'action publique quotidienne. Nous comptons les solliciter, en amont, pour réfléchir ensemble aux projets prioritaires et utiles à notre ville. -Et que proposez-vous pour éradiquer le chômage qui est très important à Stains ? Stains est une commune constituée de quartiers populaires caractérisés malheureusement par un fort taux de chômage, particulièrement chez les jeunes. Nous avoisinons ici le taux de 35% de chômage. C'est vraiment l'une de nos préoccupations majeures. Nous devons renverser cette tendance. -Comment comptez-vous y arriver ? L'une des premières mesures à prendre est d'inciter les entreprises qui sont installées et qui vont s'installer à Stains à embaucher localement. Souvent, ces entreprises viennent avec des personnels de l'extérieur de la ville. Mais nous allons essayer de mettre en place des partenariats avec ces investisseurs pour qu'ils recrutent plus nos jeunes et aussi pour les former. Cela m'amène à dire qu'il faut aussi et surtout mettre le paquet sur la formation des jeunes Stanois. Il faut concentrer nos efforts sur des formations utiles qui débouchent sur des emplois. Enfin, l'emploi est lié aussi à l'éducation. Ce point est très important. Il faut faire en sorte que nos jeunes réussissent plus à l'école puisque, quoi qu'on puisse dire, un jeune sans diplôme a toujours beaucoup plus de difficultés à trouver un travail qu'un jeune diplômé. Par contre, je ne peux pas m'empêcher de dire que cette question épineuse de l'augmentation incessante du chômage dépasse le cadre local et la solution se trouve dans l'unification de tous les efforts au niveau régional et national.