Volumineux (388 pages) et au titre long et complexe, Faty, sa fille Thas et Monsieur Pons, le roman de Hocine Haroun, artiste-peintre et président de l'APW de Tizi Ouzou, ne peut laisser le lecteur indifférent. La lecture de ce beau roman met mal à l'aise. L'auteur raconte l'histoire de personnages ordinaires, pauvres et besogneux, des militaires arrogants et des colons français spoliateurs dans les années 1940, en Kabylie. L'histoire est quelque peu déroutante. Hocine Haroun a écrit un roman qui apporte plusieurs lectures, dont la soumission volontaire au colon est la plus simple, la plus évidente. Non pas que le village ait l'air de souffrir des affres de la colonisation, du viol de son honneur et de son intégrité, mais au contraire, l'un des personnages principaux, Fatima, belle, infidèle et servile, tombe non seulement sous les charmes du sous-lieutenant Pons, affecté pour contrôler le village, mais s'offre aussi à lui corps et âme. L'auteur ne raconte pas uniquement une relation d'amour entre deux êtres humains, il narre des rapports charnels, décrits avec les moindres détails, jusqu'à l'extase. D'ailleurs, les 200 premières pages du roman décrivent, dans l'essentiel, des scènes voluptueuses entre Pons et «ses femmes». Pons, époux de Maria l'Espagnole, a aussi engrossé une compatriote, Agnès, qui donne naissance à un garçon, François. Les plus féministes des militants n'apprécieront certainement pas ce visage de la femme, pleine de désirs, obsédée et sujette aux tentations. Il faut reconnaître le talent remarquable de narrateur, d'auteur avec une imagination fertile et une maîtrise des techniques de description, le sens du détail dans une langue à faire envier les plus pointus des académiciens. A travers Faty (diminutif de Fatima), sa fille Thas (diminutif de Tassadit) et Monsieur Pons, l'auteur présente une relation entre la France et l'Algérie loin des conventions, où la guerre et les drames sont absents, mais où les rapports physiques sont légion. Pons emmène «sa fille» Thas à 13 ans en France pour y faire des études, mais elle emprunte le chemin des dépravations. Elle épouse François, fils de Pons aussi, et donne naissance à un enfant dont le père n'est certainement pas François. Elle meurt lors de l'accouchement. Alors que Thas est enterrée en France, François revient avec sa fille à Akhriv pour retrouver ses grand-mères, Fatima et Agnès. Dans le roman de Hocine Haroun, l'infidélité se lit au pluriel. A lire! Hocine Haroun. Faty, sa fille Thas et Monsieur Pons. ENAG