31 Mai. Alger. A 18h. L'histoire ? Ali, grand gaillard, père d'un mioche, quitte le domicile familial pour aller se terrer à Cannes et rejoindre sa sœur et son beau-frère. Climat oppressant, noirceur de l'âme, sauce Audiard à l'état pur. On connaît. Puis c'est la rencontre d'avec Stéphanie, au détour d'une boîte de nuit. Lui, videur, elle, agressée par un pochetron. Il la ramène chez elle. Un numéro de téléphone est donné, ce sera celui de Stéphanie. Comme ça, par curiosité. Plus tard, le drame survint. Elle se retrouvera sans jambes, dans un fauteuil roulant, l'œil fuyant. Ils se revoient. Une amitié amoureuse naît de leurs gestes tendres et violents. La vie n'est pas un long fleuve tranquille, De rouille et d'os sera donc agité. La mise en scène ? Signature d'Audiard sur le papier, mais difficile de le coincer dans l'image. On a vu ses précédents films, transcendé par De battre mon cœur s'est arrêté, intrigué par Sur mes lèvres et abasourdi par Un prophète. On a vu tout ça d'où cette semi-déception devant De rouille et d'Os. Tout est dit, expliqué, raturé, démontré, tous les détails sont captés à la loupe, tout le récit s'emmêle les pinceaux. Trop de «tout» et pas assez de zones d'ombre, de mystères, de voluptés, de ces choses que le spectateur souhaiterait s'approprier jalousement. Lorsque Ali emmène pour la première fois Stéphanie à la mer, après qu'elle ait eu son accident, il est évident qu'il lui proposera d'aller nager. Quand Audiard filme dès le début un générique en forme de rêve où l'on entr'aperçoit un enfant sur le point de se noyer, on devine facilement l'issue du film. Quand la séquence finale survient, de suite, nous savons qu'une belle déclaration explosera dans le plan. Impression désagréable comme si Audiard se cherche, doute, sans qu'on ne voie tout à l'image. Inquiétant pour un cinéaste qui a toujours su filmer ses propres romances. A la Cinémathèque.