La section du chef-lieu de wilaya de l'association Iqra a réalisé de louables progrès dans son action en direction des analphabètes. En effet, l'école du soir de deux classes que nous avions connues en 1999, avec au total 48 élèves, est, depuis, passée à un effectif de 436 apprenants répartis sur huit divisions. Cependant, le progrès ne s'arrête pas là car, les mémés et femmes d'un certain âge disent ne plus y venir sous le seul prétexte de pouvoir apprendre à lire le Coran, gênées qu'elles étaient auparavant d'être prises en flagrant délit d'occupation d'un pupitre de gamin. Maintenant, pour la plupart, elles ne cherchent plus à se faire pardonner leur « lubie ». Elles affirment, avec une touchante ardeur, qu'elles ont pris une revanche sur une négation qui les a privé d'une enfance qui, pour elles, se confond avec un sublime passage par l'école. Khadra, 68 ans, avec un pudique sourire de jeune fille, l'a dit dans un poème de son cru, des rimes nourries de beaucoup de naïveté mais surtout gorgées de sincérité. Elle l'a lu devant un nombreux auditoire venu assister, dans l'école Harchaoui, à la distribution des diplômes aux 30 lauréats, dont elle, sur les 50 candidats à l'examen d'enseignement de base, équivalent à la 6ème. Le diplôme conquis leur permet de préparer, avec Iqra et les cours par correspondance, le BEM. Cette année, il y avait déjà une classe constituée des lauréats de l'année passée. Après Khadra, Rachida a également exprimé la reconnaissance à Iqra, à Cheroud Mohamed, son responsable local, à Fatima Tlilani, la favorite des élèves parmi les seize formateurs dont quatre sont des volontaires et douze émargeant au filet social. Pour l'observateur, le progrès est encore dans le fait qu'Iqra n'est plus exclusivement une école du 3ème âge puisque, parmi ses effectifs, l'association compte 25 élèves âgés entre 12 et 17 ans, des ados qui, pour certains, n'ont jamais fréquenté les bancs d'une école. L'avancée est également dans le fait que cette école ne soit plus uniquement fréquentée par les femmes, même si cela n'est pas surprenant puisque l'analphabétisme sévit essentiellement chez ces dernières. En effet, à l'école du soir, il y a une classe de « garçons » dont le plus âgé a 82 ans.