Le prix Omar Ourtilane de la liberté de la presse (15e édition) a été décerné au chroniqueur algérien du Quotidien d'Oran, Kamel Daoud, et à la journaliste égyptienne du site Mada Misr, Lina Attallah, lors de la cérémonie organisée samedi soir à l'hôtel El Aurassi. Un prix honorifique a été également attribué au journaliste et cofondateur du Soir d'Algérie, Zoubir Souissi. «C'est un hommage aux journalistes assassinés pour que vive la liberté de la presse», lance d'emblée Zakia Ourtilane, veuve du confrère assassiné et maîtresse de cérémonie, chaleureusement applaudie par les invités de la soirée rehaussée par la présence de figures politiques. Ali Benflis, Ahmed Attaf, Mustapha Bouchachi, Louisette Ighil-Ahriz, Giuliana Sgrena ont tenu à partager cet hommage dédié à la liberté de la presse avec l'équipe du journal El Khabar. Le chroniqueur corrosif, Kamel Daoud, s'est dit «très touché par cette reconnaissance, parce que c'est un prix algérien décerné par des Algériens». Le chroniqueur, qui s'est imposé également en littérature, dont le dernier roman, Meursault, contre-enquête, salué par la critique et nominé pour de prestigieux prix littéraires, ne boude pas son plaisir. 2014 est visiblement l'année de Kamel Daoud. L'autre lauréat de la soirée, la journaliste égyptienne Lina Attallah est toute aussi heureuse d'être primée en Algérie. «Je suis très heureuse d'être la première Egyptienne à être primée. C'est un signe de fraternité qui doit se développer sur les bases de la liberté de la presse et la pensée progressiste», lance la journaliste à partir de la tribune. «Je suis fière de recevoir un prix qui porte le nom de Omar Ourtilane, un journaliste qui a payé de sa vie le droit à la liberté d'expression.» Cofondateur et rédacteur en chef du quotidien arabophone El Khabar, Omar Ourtilane a été tué le 3 novembre 1995, allongeant ainsi la longue liste des journalistes assassinés. Entre le 26 mai 1993, jour de l'assassinat de Tahar Djaout et septembre 1997, 110 journalistes et assimilés ont été lâchement exécutés. Un lourd tribut payé par les journalistes dans le combat pour la défense de la liberté d'expression face à la barbarie intégriste et au despotisme du pouvoir. Vingt ans après l'assassinat du premier journaliste, la presse libre subit encore les coups de boutoir d'un régime dont l'aversion à la parole libre est constitutive de son ADN. «Nous observons que depuis cinq ans, le champ médiatique se rétrécit et ça va crescendo. Nous sommes arrivés à une situation où l'on constate que des pressions sont exercées sur des patrons privés pour les dissuader de placer leur publicité dans des journaux aux lignes éditoriales indépendantes. La société doit être consciente de ce danger qui menace la presse libre. Nous avons trois ou quatre journaux qui restent le seul espace ouvert à toutes les sensibilités politiques et sociales», résume Cherif Rezki, directeur de publication d'El Khabar. Il se dit déterminé à lutter contre ces attaques et à «dénoncer toutes les dérives. Ils sont nombreux les Algériens épris de liberté chèrement acquise, cette liberté aujourd'hui menacée par certains dirigeants qui étaient loin du pays quand nous, nous faisions face au terrorisme».