L'artiste bécharoise prépare un projet musical avec les chanteuses traditionnelles du Bécharois. Souad Asla redonne à sa manière des couleurs au chant saharien. Cette native de Béchar, dans le sud-ouest algérien, qui vit en France depuis 23 ans, est décidée à revivifier les chansons féminines des zefanatte, des gnawiette et des ensembles ferda de la Souara. Elle prépare pour cette année un spectacle avec ces femmes qui apprennent les airs et les textes des chansons de bouche à oreille, de génération en génération. «En France, j'organise des ateliers où j'apprends à des femmes de 19 nationalités différentes les chants du Sud algérien, de Taghit en particulier. Cela me tient à cœur, car ces chants sont en train de disparaître. Je me déplace souvent à Béchar, où je rends visite à ces femmes qui se réunissent tous les vendredis pour chanter. Ces femmes sont âgées, elles disparaissent et la relève, malheureusement, n'est pas assurée. Il n'y a aucune transmission. Notre musique a une grande valeur. Il faut aller enregistrer tous ces chants, prendre des notes pour les sauvegarder, essayer de faire vivre cette culture pour qu'elle ne disparaisse pas», a déclaré Souad Asla, vendredi soir, après un concert au campement de Tidessi, à 12 km au nord de Tamanrasset, lors de la 4e soirée du 5e Festival international des arts de l'Ahaggar. Le prochain album contiendra des chansons du patrimoine populaire de la Saoura. «Dans le premier album, je n'ai fait que des chansons personnelles. J'écris des choses qui me tiennent à cœur. Il y a une chanson que j'aime beaucoup et que j'ai appelée La patera, barque en espagnol, dans laquelle je dénonce l'esclavage moderne. Des jeunes Algériens, Marocains, Tunisiens, Africains prennent des bateaux de fortune pour traverser la mer. Parfois, ils n'y arrivent même pas. C'est une catastrophe. Nous sommes en 2015 et on n'en parle pas assez. Les jeunes pensent que l'eldorado est ailleurs. Arrivés en Europe, ils sont souvent mis dans des camps avant d'être expulsés chez eux. C'est grave», a-t-elle regretté. Et de lancer ce message : «Je dis aux jeunes : ‘‘Restez chez vous. Il n'y a plus rien en Europe. Ce n'est pas l'eldorado.'' Tout est à faire en Algérie (...) En France, je me sens dans la ghorba. Je ne dis pas exil, c'est un grand mot. Je suis avec ma famille, mes enfants. Mais mon pays me manque.» Vendredi soir, Souad Asla a interprété Djabouna Mel Soudan (Ils nous ont ramenés du Soudan), qui évoque l'esclavage des anciens temps. «Dernièrement, j'ai eu la chance et l'honneur de chanter au Sénégal. J'ai été invitée à l'île de Gorée où j'ai visité la maison des esclaves. C'était une grande émotion pour moi», a-t-elle confié. Souad Asla, qui est auteure-compositeure, et qui a accompagné en tant que choriste Hasna El Bécharia depuis une quinzaine d'années, s'inspire de la musique diwan. «C'est grâce à Hasna El Bécharia que je suis sur scène», a-t-elle affirmé. Il y a de tout dans la musique contemporaine de Souad Asla. «J'élabore des mélodies sur lesquelles je mets des mots. J'ai composé les douze titres du premier album et j'ai des chansons en préparation. Je m'inspire beaucoup de la musique de Béchar et de Kenadsa. Et, en même temps, je fusionne avec les autres styles musicaux, le blues, le jazz, le reggae, la salsa, les influences marocaines. J'essaie d'y mettre ma petite touche à chaque fois», a-t-elle souligné. Souad Asla est ravie par l'écho qu'a eu son premier album Jawal en Algérie. «C'était inespéré pour moi. Je suis arrivée timidement en me disant : est-ce que l'album va plaire au public, surtout que les chansons ne font pas beaucoup bouger ? Dieu merci, le public m'a accueillie à bras ouverts», a confié l'artiste, qui a dédié une de ses chansons aux ‘‘zawalia'', les gens pauvres.