Jeudi dernier, l'université Badji Mokhtar de Annaba a abrité une soutenance de doctorat LMD en informatique dont le thème est : «Traitement décentralisé des informations visuelles dans les réseaux de capteurs sans fil multimédia». L'auteur, F. B., a été, paradoxalement, dénoncé, preuves à l'appui, par son encadreur, le Pr Lynda Dib, pour plagiat et falsification de résultats. Un scandale dont l'administration universitaire ne veut pas entendre parler et qui a fait le nécessaire, contre vents et marées, pour qu'il présente sa thèse et décroche son titre de docteur d'Etat. Qui a tort, qui a raison ? Selon Lynda Dib, l'une des plus jeunes professeures de l'Algérie, la seule à avoir publié, sans coauteur, sur le célèbre magazine spécialisé dblp, son poulain qui travaillait sous sa direction scientifique n'ouvre pas droit à la soutenance dans le fond et dans la forme. L'étudiant mis en cause est inscrit en thèse de doctorat LMD depuis novembre 2010. «Jusqu'à 2013, il a montré un semblant de sérieux et de la discipline me poussant à plus d'investissement pour la réalisation de la thèse en cotutelle, allant jusqu'à lui financer voyages, frais d'inscription et de séjour pour des conférences internationales. En mai 2013, j'ai déposé un dossier de soutenance du doctorant qui a été rejeté par le CSF (conseil scientifique de la faculté). Pour que son dossier soit introduit, le candidat s'est engagé à terminer le travail initié, apporter les corrections demandées, actuelles ou éventuellement à venir. L'étudiant m'a exigé d'introduire une demande de dérogation (un recours contre la décision du CSF). Devant mon refus, il a commencé à gigoter, poussant l'ignominie jusqu'à me menacer physiquement au sein-même du rectorat», affirme-t-elle. Cet incident a poussé l'encadreur à déposer plainte par devant le parquet d'El Hadjar. «Ce qui est grave, par contre, c'est que l'administration du département d'informatique eut remis, à mon insu, le dossier de soutenance au doctorant, qui en a fait une copie, utilisée frauduleusement par la suite», dénonce la même source en accusant l'administration d'avoir violé les principes de base pour s'adonner à un activisme délétère. Le Pr Lynda affirme avoir saisi l'administration, jusqu'à son sommet hiérarchique, pour dénoncer, preuves à l'appui, tous les dépassements et l'irrespect de son étudiant, qui, selon elle, «affirme, par écrit, que les corrections (plagiats) que je demande n'ont pas de sens et que si j'envisage un supplément de travail, en particulier la vérification du modèle qui est plagié, je n'ai qu'à l'exécuter moi-même». Pourtant, lors de la 3e inscription de F. B., elle a indiqué un taux d'avancement sur sa thèse de presque 70% et pour la 4e un taux de 71%. Ce qui indique que le doctorant refuse les directives de son encadreur malgré le fait que dans son dossier il s'est engagé officiellement à respecter ces directives et à apporter les corrections demandées. En octobre 2014, l'encadreur a appris qu'une commission avait traité en urgence le seul dossier de cet étudiant. «Un dossier que je n'ai pas introduit», martèle-t-elle. Quelques jours après, l'administration a établi une note permettant à cet étudiant de soutenir sans réinscription pour l'année en cours. Ce qui est contre la réglementation de la gestion du doctorat LMD. «Consciente de ma responsabilité scientifique, forte de mon honnêteté intellectuelle et ne supportant pas d'être jugée par le club des gens qui s'entendent trop bien, j'ai saisi le Conseil d'éthique et de déontologie universitaire qui, malheureusement, n'est plus en fonction selon son président», déplore-t-elle. Devant son refus, l'encadreur accuse ouvertement l'administration d'être à l'origine «d'un trafic de procédures et à couvrir des plagiats et des falsifications de résultats. La démission d'un jury étranger a été même remplacée par un proche par alliance du vice-recteur (VRPGR)». Se référant à l'article 26, arrêté 191 du 16-07-2012, régissant le doctorat LMD, le doctorant, selon son encadreur, n'a pas nettoyé sa thèse des plagiats et surtout des falsifications des résultats. Contacté, le rectorat de l'université de Sidi Amar réfute en bloc toutes ces accusations en affirmant qu'«il faut savoir qu'un taux de 30% de plagiat est toléré dans nos universités. C'est un jeune étudiant brillant qui a publié à plusieurs reprises dans des supports internationaux. Nous avons décidé de l'aider et faire la médiation entre l'encadreur et son doctorant. Devant le refus du Pr Dib, c'est le conseil scientifique qui a parrainé le travail jusqu'à la soutenance de l'étudiant.» Quant au désormais docteur F. B., il a refusé de répondre à nos sollicitations afin d'apporter sa version des faits.