La nécropole mégalithique de Roknia, commune située 34 km au Nord-Ouest de Guelma, est sans conteste la plus importante d'Afrique du nord, de part sa concentration en dolmens et hypogées. «Il est question ici, non pas de dizaines de sépultures datant de la protohistoire, mais bien de milliers occupant pas moins de quatre kilomètres de long sur trois cent mètres de large, par endroits, dans cette nécropole classée patrimoine national», nous révèlent des archéologues et historiens de Guelma, connaissant bien cette région pour y avoir travaillé dans le cadre d'un ou plusieurs thèmes de recherches et de publications scientifiques. En effet, après 20 minutes de route sur le chemin de wilaya 122, tronçon routier Hammam Debagh-Roknia, une petite plaque à gauche, tout juste visible, indique aux automobilistes la piste à prendre. Une piste cahoteuse de près d'un kilomètre, au bout de laquelle s'offrent à nos yeux les sépultures dolméniques (table de pierre abritant une tombe) pour ensuite découvrir au flanc d'une falaise une multitude d'hypogées (tombes creusées dans le roc avec une fenêtre). «Notre région regorge de vestiges archéologiques. Celui de la nécropole de Roknia est là pour en témoigner», nous déclarent des habitants de la région, conscients de ce patrimoine d'une valeur inestimable. «Sauf que le lieu n'a pas fait l'objet d'une attention particulière de la part des autorités. Il est pour ainsi dire abandonné. Seule la présence d'un gardien durant la journée freine les ardeurs des visiteurs trop envahissants», affirment nos interlocuteurs. Ainsi, il n'est pas obligatoire d'être un mordu de l'archéologie, ou un fin connaisseur en nécropoles mégalithiques pour découvrir ou redécouvrir ce lieu, situé dans un relief escarpé, avec pour toile de fond des étendues féériques. «Ce que je peux vous dire, c'est que ce site devrait être protégé des agressions humaines. Durant les années 1980, une clôture avec une entrée et deux locaux en dur ont été construits. Mais durant la décennie noire du terrorisme, cette installation a été fortement dégradée et aujourd'hui complètement détruite», nous révèle le P/APC de Roknia, présent sur les lieux. La réhabilitation et la valorisation du site touristique de Roknia, n'étant pas, maniestemment une urgence pour les autorités locales, le volet des fouilles archéologiques ne semble guère mieux loti. « Il n'y a jamais eu de fouilles archéologiques depuis l'indépendance du pays à nos jours. Et pourtant, il serait pertinent de le faire, d'autant que le lieu foisonne de mobiliers funéraires encore enfouis sous terre», nous déclarent des archéologues qui ont souhaité garder l'anonymat. «Les pièces exhumées de la nécropole mégalithique de Roknia, entre le 19e et le 20e siècle, par des archéologues français, sont aujourd'hui, réparties entre le musée du Bardo à Alger et celui de Germain-en-Laye en France», précisent nos sources. «Il n'est pas simple aujourd'hui d'obtenir des autorisations pour les fouilles. Les chercheurs savent qu'il n'y a pas d'or ici. Mais les ossements dans les chambres sépulcrales, la poterie et parfois des bijoux en bronze méritent leur place dans un musée, et le cas échéant des études plus poussées devront être menées pour enrichir nos connaissances sur des hommes d'une évolution remarquable, ayant vécu dans cette région contrairement à leurs congénères d'Europe, pour n'avoir pour simple mobilier funéraire qu'une hache ou un couteau», concluent-elles.