Durant la première audience de ce qui s'annonce comme un procès difficile, les juges milanais ont rejeté la demande de Sonatrach de se constituer partie civile. L'association Le Mouvement des Algériens dans le monde a également été déboutée. L'ouverture du procès qui voit jugés sept prévenus pour corruption internationale et fausses déclarations au fisc a été marquée, comme prévu, par l'analyse de questions préliminaires. Durant quatre heures, les juges milanais ont examiné les demandes des parties en cause, avant de se réunir en chambre du conseil pour délibérer. Rappelons que quatre anciens dirigeants de Saipem et trois Algériens, soupçonnés d'avoir joué le rôle d'intermédiaires pour le versement de pots-de-vin à des responsables algériens, sont poursuivis dans cette affaire qui a défrayé la chronique aussi bien en Italie qu'en Algérie. Un pactole de 198 millions de dollars aurait atterri dans les comptes de responsables algériens contre l'octroi à la société italienne Saipem de marchés pour le montant de 8 milliards d'euros dans le domaine de l'exploration et l'exploitation d'hydrocarbures. Pietro Varoni, qui était le directeur des opérations de Saipem, Alessandro Bernini, ancien directeur financier d'ENI d'abord et ensuite de Saipem, Pietro Tali, ancien président et administrateur délégué de Saipem, mais également Farid Nourredine Bedjaoui, homme de confiance de l'ancien ministre de l'Energie Chakib Khelil, Samir Oureid et Omar Harbour, deux intermédiaires du neveu de l'ancien ministre des Affaires étrangères, Mohamed Bedjaoui. Les trois hommes sont en fuite et un mandat d'arrêt international a été lancé contre eux. Tous les accusés étaient représentés, hier, par deux avocats chacun. Le défenseur de Omar Harbour a soulevé un vice de forme quant à l'absence, selon lui, de notification à son client et a demandé que ce dernier soit séparé du reste des accusés, pour «rectifier» la procédure. Le président du collège des juges, Marco Tremolada, a accueilli l'objection de la partie adverse qui a soulevé le fait que la demande de constitution de partie civile présentée par l'avocat du groupe énergétique algérien, maître Giacomo Gualtieri, du studio légal milanais Bana, porte la signature du seul PDG du groupe énergétique algérien, alors qu'en Italie ce genre de requête doit émaner du conseil d'administration après la tenue d'une assemblée générale qui l'adopte. Ce à quoi l'avocat Gualtieri a rétorqué que les statuts de Sonatrach le permettaient. La défense a alors exigé de voir la copie portant traduction en italien de l'intégralité de ce document. Face à l'absence de cette pièce, les juges ont donné raison, pour l'instant, aux avocats de Saipem. La prochaine audience qui marquera le début effectif des débats a été fixée au 29 février prochain, ce qui représente un délai très court pour la justice italienne connue pour ses longs procès. Cela dénote de la volonté des juges de la quatrième section pénale du tribunal de Milan de parvenir, rapidement, à un verdict dans cette affaire. La demande de l'un des imputés, Tullio Orsi, ancien président de Saipem-Algérie, le seul qui a été arrêté et emprisonné depuis le début de cette affaire, de trouver un «arrangement» avec la justice — ses avocats ont proposé la peine de deux ans et 10 mois de prison et la confiscation de la somme de 1,3 million de francs suisses — ne manquera pas de renforcer la position accusatoire du parquet.