Directeur des ressources humaines de 2000 à 2015, le général à la retraite Ali Ghediri est bien placé pour parler de ces amendements, lui qui avait été l'initiateur et le rédacteur, en février 2006, du statut de la fonction militaire. Il explique que l'obligation de réserve relève plus de l'éthique et de la morale que du juridique. «On confond souvent entre interdire à un militaire de divulguer des secrets professionnels qu'il a eu à connaître dans l'exercice de ses missions, qui tombent sous le coup du code de justice militaire, et dans le cas d'un retraité du code pénal», explique Ali Ghediri. Revenant sur le statut de la fonction militaire de 2006, il rappelle que le texte a prévu des dispositions qui protègent le militaire dans l'exercice de ses fonctions. «Les articles 56 à 59 permettent aux autorités compétentes de mettre en action la justice contre toute personne qui porte atteinte à l'honneur de tout militaire dans l'exercice de ses fonctions. Pourquoi n'a-t-on jamais appliqué ces dispositions notamment au moment où l'institution militaire était la cible de graves accusations ? Ces dispositions étendent cette protection y compris aux militaires versés dans le civil. Nous avons entendu un chef politique qualifier un officier supérieur de céphalopode et le ministère de la Défense n'a pas réagi. Je ne défends pas la personne citée, mais j'ai le droit de m'interroger sur ces décisions et leur opportunité. Je ne veux pas revenir sur le passé, mais je m'inquiète de ce qui se projette. L'affaire Benhadid n'est qu'un alibi. Je pense que la portée de ce projet de loi est à chercher ailleurs. Aller jusqu'à confisquer la liberté d'expression consacrée par la Constitution, c'est qu'on a une idée derrière la tête.»