Qui de nous n'a pas eu affaire un jour à un maçon, un électricien, un plâtrier, un plombier, un réparateur de réfrigérateurs, un menuisier, un serrurier ou un matelassier ? Si, autrefois, la ménagère se dispensait de faire le parcours du combattant pour solliciter les services de cette corporation, il n'est pas aisé de dénicher de nos jours ces petits corps de métier sans avoir le tournis. Et encore ! Ces artisans orfèvres qu'on trouvait à chaque coin de maison ne courent plus les rues. A croire que les centres de formation de ces savoir-faire ont disparu. Et la ménagère est là à tourner en rond à la recherche de cette main experte pour voler à son secours pour des travaux domestiques qui urgent. Elle recourt aux connaissances de ses parents qui lui demandent de patienter. Elle implore son voisin de palier de supplier son artisan attitré de faire un saut chez elle, mais ce dernier est occupé. Elle tarabuste la voisine de la voisine de l'immeuble d'en face de prendre langue avec le tâcheron dépanneur pour qu'il vienne à sa rescousse. Rien n'y fait. Elle doit prendre son mal en patience et prier la bonne étoile. Elle éprouve toutes les peines du monde à faire «main basse» sur l'artisan. Les échoppes artisanales qui essaimaient jadis, se dit-elle, les «houmate» ont cédé le pas à des activités plus juteuses et moins contraignantes. Celles qui collent à l'air du temps. Sa voisine de palier inférieur n'est pas en reste. Elle en a marre d'attendre ce maçon qui, pourtant, ne l'a jamais laissée poireauter. Une autre voisine lui raconte qu'elle a dû remuer ciel et terre pour s'attacher les services d'un ouvrier peintre pour lui relooker l'intérieur de sa demeure. Sa tante lui raconte qu'elle a langui d'impatience pour voir toquer à la porte l'électricien bâtiment pour rétablir l'installation qui vient de péter. Sa sœur, quant à elle, lui fait part qu'elle a été tournée en bourrique en attendant vainement le charpentier qui lui a promis, pourtant de lui refaire l'auvent de la porte d'entrée de sa villa ainsi que la toiture. Alors que sa copine râle et attend toujours le serrurier qui trouve un malin plaisir à lui faire faire le pied de grue, sa maman peine à trouver un spécialiste en étanchéité qui, après lui avoir soutiré une avance, a pris la clé des champs pour un aller sans retour. Cette dernière ronge son frein pendant que sa cousine attend chaque jour le technicien en froid qui a fini par renvoyer son rendez-vous aux calendes grecques, ne jugeant pas utile d'intervenir pour réparer le congélateur qui suinte. Sa grand-mère, souffreteuse, elle, n'échappe pas à la règle : elle a beau prier le jeune matelassier du coin de se présenter chez elle pour lui rembourrer sa couchette – en ne manquant pas de faire preuve à son égard de ces propos bienveillants de «Iziyân sa'adek ya oulildi» –, mais celui-ci, contre toute attente, refuse de grimper cinq étages, arguant qu'il a le vertige. Quant au maçon auprès de qui elle insiste depuis un bail pour lui réparer le siphon de son cabinet d'aisance, elle peut s'accrocher quelques gamelles, car il a pris la tangente non sans siphonner son portefeuille. Autrement dit, il a pris bien soin quand même de prendre et les arrhes et… el ‘aar.